Continuité écologique : Joël Quillacq, un Maire avisé dans les Landes

Le bon sens existe. Puissent les autres élus locaux s’inspirer de cet excellent exposé qui a nécessité une analyse de fond de tous les points abordés.

Nous reproduisons in extenso cette délibération clairvoyante.

Département des LANDES – COMMUNE DE LOUER.  EXTRAIT DES DELIBERATIONS DU CONSEIL MUNICIPAL

Séance ordinaire du 14 mars 2014.Nombre de membres afférents au Conseil Municipal : 10 ; en exercice : 10 .qui ont pris part à la délibération : 8

Date de la convocation : 03/03/14 Date d’affichage : 03/03/2014. L’an deux mille quatorze et le quatorze mars à dix-huit heures,le Conseil municipal de cette commune, convoqué en session ordinaire, s’est réuni au nombre prescrit par la Loi, dans le lieu habituel de ses séances, sous la présidence de M. Joël QUILLACQ, Maire.

Étaient présents : BAGET Nicole, RACAUD Monique, VINCENT Gérard, FERREIRA Christian, BOROWIECKI Jean, DUCOURNAU Mireille, GAUVIN Jérôme, QUILLACQ Joël. Excusés : LALAU Véronique, BARREALES Jésus. Madame Monique RACAUD est nommée secrétaire de séance.

 

OBJET : 08-15 MOTION DU CONSEIL MUNICIPAL DE LOUER EN REPONSE AU COURRIER DU SYRBAL DU 13/02/14

Position du Conseil Municipal de Louer sur la question des barrages et seuils transversaux sur les rivières du SYRBAL.

Un constat : la qualité des eaux superficielles et souterraines est médiocre, voire mauvaise, et les poissons migrateurs sont en voie de disparition.

La loi

La Directive cadre européenne oblige à l’obtention du bon état écologique et chimique des eaux pour 2015 ; les actions doivent concerner, en priorité, la reconquête de l’état biologique c’est-à-dire la lutte contre les pollutions de toutes origines industrielles, agricoles, urbaines etc… ; ensuite, la reconquête de l’état hydro- morphologique c’est-à-dire le rétablissement de la continuité écologique pour la circulation des sédiments et des poissons migrateurs.

Si ces objectifs ne sont pas atteints, l’Etat devra payer des amendes, ce qui est déjà le cas, et la France a du retard.

En France, la LEMA 2006 (Loi sur l’eau et les milieux aquatiques) s’applique, l’ONEMA en a la charge du contrôle, et sur notre territoire, l’Institution Adour diligente une étude globale pour l’aménagement des obstacles prioritaires dans les Landes.

Dans ce contexte, les barrages sont en ligne de mire, et tous les barrages ; 2 solutions sont proposées : soit l’arasement financé à 100%, soit l’équipement en passes à poissons financé à 80% ; tout est fait pour opter pour l’arasement car les 20% restant représentent une somme très importante qui dépasse les capacités des propriétaires dont les moulins ne rapportent plus rien.

Quelles sont les conséquences ?

Sur le plan écologique

il n’y a aucune certitude que ces opérations aient un résultat positif, ni sur la continuité écologique car ces petits barrages laissent passer les sédiments en période de crue, ni sur la qualité de l’eau puisque celle-ci se détériore depuis une cinquantaine d’années alors que certains ouvrages existent depuis plus de 400 ans, ni sur la population des poissons migrateurs dont les causes de la raréfaction sont ailleurs : pollutions, surpêche, modification des milieux ….

Par contre, ces barrages ont plusieurs avantages : ils contribuent à freiner la vitesse de l’eau et constituent des zones d’eaux profondes et calmes pour les espèces comme carpes, gardons, brochets, surtout en période d’étiage ; ils n’ont jamais empêché la remontée des anguilles ; ils ont contribué à créer des écosystèmes intéressants en amont et en aval ; ils n’ont jamais empêché que les rivières aient été très poissonneuses.

Donc, leur arasement aura pour conséquences de faire baisser la ligne d’eau, d’encaisser le cours d’eau, d’augmenter l’érosion des berges, de raboter le fond du lit mineur, donc de détruire les habitats piscicoles, d’assécher les dernières prairies humides pourtant protégées pour leur flore et leur faune, d’empêcher le rechargement de la nappe d’accompagnement et également, de priver les irrigants d’une ressource à laquelle ils ont droit et pour laquelle ils payent des redevances aux Agences.

Les rivières du SYRBAL s’écoulant dans des terrains fragiles, surtout en aval, vont devenir de gros drains collecteurs sans eau ou avec un débit trop faible l’été. Et les syndicats de rivière n’auront plus les moyens de réparer les dégâts causés aux berges. La solution de l’équipement en passes à poissons peut se comprendre à condition qu’elles servent à quelque chose. Or, rien n’est moins sûr car les migrateurs sont en voie de disparition pour d’autres causes évoquées plus haut.

Sur le plan financier

Dans les deux cas, arasement ou équipement, ce sont des sommes considérables d’argent public qui vont être mobilisées : 10 millions d’€ pour les Landes, 1 million d’€ pour 10 barrages concernés du territoire du SYRBAL. Et ce n’est qu’une première étape qui ne concerne pour le moment que les ouvrages prioritaires (100 000 € en moyenne par barrage) ! Or, il n’y a aucune certitude que ces opérations aient un résultat positif, ni sur la continuité écologique, ni surtout sur la qualité de l’eau qui est l’objectif principal.

Donc, le risque est d’engloutir des masses considérables d’argent public 2 fois inutilement : le résultat imposé par l’Europe ne sera pas atteint et il faudra continuer à payer des amendes.

Sur le plan juridique

Pourquoi les propriétaires souhaitant conserver le barrage de leur moulin auraient à payer 20% alors qu’ils ne sont pas responsables, ni de la dégradation de l’eau, ni des poissons migrateurs ?

Ils ne rentrent pas dans le cadre pollueur-payeur qui est le principe de redevances aux Agences de l’eau.

De plus, ces opérations supposent des études d’impact sérieuses sur les milieux, une information et une participation des propriétaires riverains et des élus des syndicats de rivière.

Sur le plan social et économique : c’est un patrimoine rural très intéressant sur le plan des savoirs faire artisanaux qui a aussi façonné les paysages de nos campagnes. Ce serait une perte considérable pour les propriétaires et pour la collectivité.

Conclusion

Nous ne sommes pas certains que le rapport coût-bénéfice soit prouvé : le financement des opérations sur les barrages se fera au détriment des opérations de reconquête de la qualité ce qui empêchera de parvenir à l’objectif de bon état des masses d’eau pour 2015 ni pour 2022.

Pour toutes ces raisons, nous demandons une approche beaucoup plus raisonnée du rétablissement de la continuité écologique : par exemple, équiper le premier ouvrage et évaluer les résultats (c’est une obligation pour l’administration et le rôle des fédérations de pêche) ; distinguer les grands barrages hydro-électriques des fleuves, de nos petits barrages des rivières.

Nous demandons un respect de la DCE dans ses préconisations c'est-à-dire la reconquête du bon état bio chimique des eaux et une prise en compte de la consultation sur les enjeux du bassin d’avril 2013.

Le public a majoritairement qualifié de prioritaires les enjeux suivants :

- Renforcer la lutte contre les pollutions liés aux nitrates et aux pesticides au regard de leurs impacts sur la santé publique et la biodiversité, à 75%.

- Lutter contre des substances dangereuses et poursuivre l’élimination des métaux lourds et solvants, à 72%.

- Assurer tous les usages de l’eau et la bonne santé des milieux aquatiques dans le contexte du changement climatique et de sécheresses récurrentes, à 62%.

Deux autres enjeux sont jugés importants : une meilleure connaissance des milieux aquatiques (51%) et le développement des partenariats locaux entre les collectivités, les acteurs économiques et associatifs (44%).

Il ne s’agît pas de montrer à l’Europe que la France fait quelque chose pour ne pas avoir à payer d’amendes, mais d’être efficace en matière de qualité de l’eau puisque c’est de cette qualité dont la santé dépend.

La santé humaine est aussi importante que celle des migrateurs.

Restaurer la qualité de l’eau et des milieux, protéger les zones humides est le grand enjeu de notre société et les passes à poissons ne sont pas la panacée.

Encore faut-il mettre l’argent où il faut, sachant que ce n’est pas uniquement une question d’argent mais de politiques publiques.

 

Fait et délibéré, les jour, mois et an que-dessus,

Pour copie conforme, LOUER, le 17 Mars 2014

Le Maire,

JOEL QUILLACQ

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