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SDAGE 2022-2027 ; commentaires sur le projet de programme de mesures.

Le Comité de bassin de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne gère l’eau, rédige le SDAGE, favorise la concertation et sollicite l’avis du public. A ce titre, voici celui de l’OCE.

Ø La continuité dans la croyance, renforcée par le changement climatique.
Toujours la même continuité dans les affirmations sans preuves scientifiques, telles celles sur
le taux d’étagement.
Il était de bon aloi de citer le changement climatique dans le SDAGE. Mais l’utiliser à charge ou à décharge selon la justification de la mesure à prendre montre que nous avons 20 ans de retard dans l’anticipation et que nous mettrons 20 ans à y répondre.

 

Ø Des sujets d’intérêt général oubliés
• Défaut de prospectives : par exemple, est-ce que le changement climatique contraint dès maintenant les aménagistes à changer la doctrine sur la gestion quantitative de l’eau ?
Est-ce que le stockage (qui était un tabou politicien) ne serait pas considéré comme une nécessité pour répondre aux enjeux divers des besoins en eau ? Ce défaut de prévoyance et de prospectives réduit la gestion quantitative de l’eau aux arrêtés sécheresses et à prôner la sobriété. Est-ce une gestion responsable et durable ?
La réduction des consommations, oui très bien ; mais jusqu’où « réduire » dans un pays richement doté en eau ?

Pour illustrer l’intérêt porté au changement climatique, le domaine « quantité d’eau » ne représente que 5 % du budget total 2022- 2027, soit 184 millions d’euros.

• défaut de prise en compte de l’ACB (analyse coût-bénéfice) dans les préconisations, ni de la responsabilité des prescripteurs,
• défaut de mesures correctives concernant les centaines de tonnes d’études sans suite, financées sur fonds publics dans le SDAGE 2016-2021.

 

Ø De vieux concepts inappropriés
Le plus obsolète est incontestablement la notion de « stockage hivernal » et de « période de remplissage jusqu’au 30 avril » qui prive la dérivation de toute l’eau excédentaire des fortes pluies et orages de juin-juillet 2021. Il est coupable de laisser perdre dans l’océan des milliards de mètres cubes quand on a peut-être pas pu faire le plein hivernal en raison d’un déficit de précipitations. On voit des prescriptions dans certains arrêtés préfectoraux au sujet des modalités de remplissage défiant tout bon sens.

 

Ø ZRE (Zone de répartition des eaux)
Dans les autorisations dérogatoires de création de plan d’eau, à l’agriculture, il convient d’ajouter « pisciculture », une filière d’intérêt national. Il ne semble pas que la mission d’un SDAGE soit de condamner la pisciculture continentale d’autant que cette production est éligible aux financements européens et que notre balance commerciale est très déficitaire.

 

Ø Les paradoxes flagrants et les dérives démocratiques ont la vie dure

Discussion :
le grand paradoxe est l’omerta sur le réel état (nombre, pathologies) des stocks de migrateurs. Ils subissent des impacts très lourds en mer et dans les estuaires. Aux rares rescapés qui arrivent à rejoindre l’eau douce, on consacre des budgets considérables alors qu’ils doivent échapper à une autre prédation encouragée : la pêche et le silure.
La protection des espèces = oui, quand les mesures offrent la moindre perspective de restaurer les stocks.
Mais quand on a tout essayé en moyens humains et financiers depuis 30 ans et que les stocks diminuent inexorablement, la responsabilité exige de s’interroger sur la légitimité :
de leur consacrer de tels budgets ?
• d’infliger des charges spéciales exorbitantes aux propriétaires d’ouvrages en faveur exclusive d’espèces menacées de disparition ou déjà inexistantes ?
• à quel stade place-t-on le curseur de l’arrêt de l’acharnement thérapeutique ?
• le SDAGE continuera-t-il a édicter des règles pour des frayères potentielles 30 ans après la disparition du dernier poisson migrateur ?
• dans l’effort de « connaissance » le SDAGE, anticipe-t-il le sujet essentiel de l’inventaire des stocks par cours d’eau ?


Nous notons toujours les incohérences flagrantes par exemple :

 

• entre « 7B – Assurer l’équilibre entre la ressource et les besoins à l’étiage »

• et « 1E – Limiter et encadrer la création de plans d’eau », le SDAGE édicte un outil absent du Code de l’environnement pour interdire la création de plans d’eau. Ce transfert de pouvoir accordé aux membres du Comité de bassin au mépris des parlementaires est une dérive. Si le SDAGE s’impose à tous les porteurs de projets, la loi devrait s’imposer au SDAGE.

ou encore :
• entre la préconisation dogmatique, là encore non exigée par la loi, sur la destruction des ouvrages qui remettent en charge tous les sédiments et la mesure « 44B – Aménager les bassins versants pour réduire le transfert de pollutions diffuses ». Indépendamment de l’intérêt piscicole, quelle était la nature des 900 000 mètres cubes de sédiments du barrage de Maisons Rouges ? Pollués ? Radioactifs ?
Le bassin versant devrait être équipé de bassins ou canaux de décantation, dimensionnés à la mesure de l’érosion et pollution produites.
C’est tellement simple que ce n’est (presque) jamais mis en œuvre.

Ø Liste illégale des réservoirs biologiques
Cette liste est inadmissible à plusieurs titres :
• elle bafoue le classement des cours d’eau puisqu’ils sont tous classés L1, L2 et « réservoirs biologiques ».

• elle bafoue le droit de propriété privée en ce sens qu’elle tenterait d’élargir le champ d’application du code de l’environnement « jusqu’ à la source » à des affluents et écoulements d’eau privés qui ne sont pas des « cours d’eau » selon leur caractérisation légale.

Nous commentons succinctement encore quelques mesures :

2.4.1. Continuité écologique

Tous les plans d’action à son sujet devront être modifiés pour tenir compte de l’évolution réglementaire qui interdit désormais la destruction des ouvrages hydrauliques ainsi que la décision du Conseil d’État sur l’application de l’art L.214-18-1 CE.
Nous l’écrivons depuis longtemps, au lieu d’une obsessionnelle volonté de détruire, si une petite partie de l’argent gaspillé sans effet depuis 2012 avait été orienté vers la restauration des vannages(*) permettant de « gérer », certains reproches  tels ceux encore exposés ci-après à l’encontre des ouvrages auraient pu être significativement atténués.

2.4.2. Morphologie des cours d’eau

Le taux d’étagement = de la pure propagande :
Il serait le 13ème facteur de dégradation piscicole (
Villeneuve et al 2015).
Rappelons encore et toujours que pendant plus de deux siècles avant 1960, le taux d’étagement n’a empêché ni le transit sédimentaire ni des peuplements piscicoles pléthoriques.
La rhétorique sur les prétendues « nécessités » est donc suspecte : « les actions permettant de réduire la hauteur de chute cumulée des ouvrages transversaux sur une masse d’eau sont favorables à la fois à la fonctionnalité des habitats aquatiques et riverains, à la libre circulation piscicole et au transport des sédiments.
Il est donc nécessaire d’envisager des actions d’arasement ou d’effacement d’ouvrages transversaux en particulier sur les masses d’eau qui cumulent des dysfonctionnements hydromorphologiques et des enjeux forts de circulation piscicole, notamment liés aux grands migrateurs. De telles actions doivent aussi être programmées pour atteindre les objectifs de réduction du taux d’étagement fixés par les SAGE en application de la disposition 1C-2 du SDAGE 
».

2.4.3. Plans d’eau
Définition de zones dans lesquelles il est interdit, nonobstant les besoins, de créer des plans d’eau (disposition 1E-2 du SDAGE). Il n’est pas établi que cette mesure n’aille pas à l’encontre de l’intérêt général. Qu’il y ait des étiages sévères est un fait. Mais il y a aussi statistiquement dans ces zones des « coups d’eau » significatifs provenant d’orages. Mais les prospectives sont sclérosées par le véto  écologiste, avec un triste mort à SIVENS, sur le stockage d’eau gravitaire.
C’est dans ces zones que la création de plans d’eau, alimentés par l’eau excédentaire gravitaire, est nécessaire.
La France finance ce type de projets dans de nombreux pays de l’hémisphère sud.

Conclusion
• Un SDAGE qui se donne beaucoup de moyens sans obligation de résultats : c’est la continuité de l’échec du « bon état 2015 ».
• dommage pour les derniers migrateurs et pour les pêcheurs qui consomment leurs prises, auxquels on offre une eau polluée : les stations dites d’épuration ne sont dotées que de 26% du budget, actant peut-être le fait qu’il n’y a plus grand-chose à faire pour eux ?
• refus de voir les réalités, de les identifier et de les nommer. Quand l’Agence de l’eau  cite par exemple des « pollutions accidentelles » depuis des décennies, ne deviendraient-elles pas permanentes ?
• selon nous « favoriser l’apport suffisant d’eau douce à la mer aux périodes sensibles » ne devrait en aucun cas être un objectif, mais la résultante naturelle de mesures efficientes mises en œuvre en amont, sans contrarier les objectifs de production. Ils devraient être encouragés au lieu d’être clairement entravés.
• Il devient urgent de revenir au bon sens, de cesser de faire croire aux élus que certaines mesures doivent être prises alors qu’elles ne produisent aucun effet et d’adapter les paradigmes pour enfin répondre aux besoins.
• le discours sur la destruction d’ouvrages servi par des pseudo-études de circonstances n’a que trop duré.
Nous avons droit à des cours d’eau aux usages partagés, où l’homme et tous les actes de production ne soient plus déconsidérés ni exclus.

(*) nous observerons comment l’Agence de l’eau réorientera ses subventions après l’interdiction de détruire les ouvrages.
Maintiendra-t-elle le budget global consacré à la Continuité écologique ? On verra tout de suite sa réelle volonté d’améliorer la qualité de l’eau si l’économie faite sur les destructions est consacrée aux aménagements : augmentation du taux d’aide ( qui n’avait rien d’incitateur )  et allouer une subvention aux vannages (qui en ont toujours été exclus puisque l’objectif dogmatique était de tout détruire).
On verra si cette période charnière confirme l’écologie punitive politicienne ou si l’objectif plus technique consiste à améliorer l’existant.
Compte tenu de la composition des membres du Comité de bassin, nous avons notre petite idée. Nous leur laissons exprimer leurs objectifs qui devraient en toute logique être actualisés, à défaut de confirmer une doctrine politicienne n’ayant pas produit beaucoup d’effets environnementaux, hormis des préjudices socio-économiques.

les pièces sont consultables et nous vous invitons à donner votre avis :    https://sdage-sage.eau-loire-bretagne.fr/home/projet-de-sdage-preparer-la-re-1/les-documents-du-sdage-2022-2027.html

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