Tréméven (22) : l'arasement, déclinaison locale d’un scénario national

Assurément, rien ne change en termes d’acharnement administratif sur les ouvrages hydrauliques sous couvert d’écologie. Dans ces deux articles de « La presse d’Armor », tout y est : la libre expression bafouée des objectifs de la population, les arguments pertinents des élus locaux, ainsi que la désinformation habituelle des autorités en charge de l’eau, reprise sous la plume d’un journal qui ne prend pas le temps de vérifier ses sources erronées. La DDTM semble faire fi de la « grille d’analyse » multicritères (18 septembre 2017) qu’elle est censée faire respecter.

Nous relevons les points exposés. Ils sont par ailleurs longuement développés dans nos articles.

1)    La DDTM n’a pas « à demander l’arasement du déversoir » (désigné « seuil » ou « barrage » dans notre jargon) que la loi n’exige pas.

2)    La stratégie : la DDTM hiérarchise ses proies dans la mesure où elle arrive plus facilement à obtenir l’accord des élus, à qui on martèle la même désinformation et à qui on fait miroiter une grosse carotte à la subvention pour recueillir leur consentement… au mépris de l’efficience des dépenses publiques.

3)    « La disparition des ouvrages hydrauliques est fortement conseillée » par une poignée des penseurs, mais fait l’objet de controverses et d’opposition de la quasi-totalité des usagers de la rivière, riverains, propriétaires d’ouvrages…

4)     « selon le droit européen et français » rien n’oblige les destructions, point.

5)    « Le droit européen et le droit français sont clairs : sans activité économique, le droit d’eau est caduc, et s’il est caduc l’arasement est obligatoire ». Là, nous ne sommes plus dans l’erreur mais dans un double mensonge, c’est clair.

6)    Les scénarios de la brèche et d’abaissement de la cote légale de la crête ne s’imposent ni techniquement ni administrativement. L’art L.214-17 CE impose que l’ouvrage soit « géré, entretenu et équipé (…) en concertation avec le propriétaire».

7)    Si la passe à poissons n’est plus conforme (en raison de nouvelles prescriptions administratives), il suffit que le maître d’ouvrage de 1979 la mette en conformité, la rende également compatible et agréable aux kayaks (dans l’esprit de la multifonctionnalité des usages et du partage des cours d’eau). Ce scénario est satisfaisant pour tous.

8)    « Les services de l’État jugent la solution de l’arasement partiel acceptable si la continuité piscicole est rétablie ». L’administration outrepasse ses droits : une passe à poissons rétablissant la continuité piscicole (si tant est que la preuve de son interruption piscicole ait été produite par l’administration) est « acceptable », même si, nous l’avons compris, elle préfère dogmatiquement l’arasement partiel.

9)    Enfin, la DDT ne semble pas avoir informé le maître d’ouvrage du montant de l’indemnité qu’il pourrait recevoir de l’Etat au titre de la « charge spéciale exorbitante ».

 

Déversoir de Saint-Jacques à Tréméven : la GP3A mise en demeure d’araser

C'est officiel, la direction départementale des territoires et de la mer vient de mettre en demeure la GP3A d'araser le déversoir de Tréméven.

Publié le 7 Mar 18 à 7:01

 

Chantal Delugin a promis une réunion publique prochainement pour évoquer la mise en demeure d’araser le déversoir de Saint-Jacques. (©La Presse d’Armor)

La nouvelle a été annoncée par la maire de TrémévenChantal Delugin, lors du dernier conseil municipal. La DDTM, direction départementale des territoires et de la mer, demande l’arasement du déversoir de Saint-Jacques.

On en parle depuis 2009. La disparition des ouvrages hydrauliques comme les déversoirs sur les rivières est fortement conseillée s’ils n’ont plus de raison d’être.

En l’occurrence, les déversoirs servaient à alimenter les moulins en eau, mais ces derniers sont depuis longtemps à l’arrêt. Selon le droit européen et français, l’arasement de ces ouvrages permettrait d’assurer la continuité écologique des cours d’eau et de faciliter le retour d’une faune souvent mis à mal par les activités économiques.

A Tréméven en 2009, la population avait répondu au projet d’arasement par une pétition. Depuis, aucune mise en demeure n’avait été lancée.

Lire aussi : Patrimoine : Tréméven veut sauver son déversoir

C’est l’agglomération Guingamp-Paimpol qui est propriétaire des installations du déversoir et de l’ancienne pisciculture à Saint-Jacques, comme l’a rappelé Chantal Delugin :

 La GP3A a récemment été mise en demeure pour procéder à l’arasement du déversoir. L’agglomération doit fournir sa réponse pour le 31 mai, les travaux devant être réalisés à l’automne.

Une réunion publique annoncée

Chantal Delugin a évoqué les suites possibles de ce dossier contentieux.

D’ores et déjà, elle souhaite organiser dans les plus brefs délais une réunion d’information « en collaboration avec les élus de GP3A et les services concernés ».

 

Rédaction PaimpolLa Presse d'Armor

 

Patrimoine : Tréméven veut sauver son déversoir

Pour des raisons de continuité écologique, Tréméven devrait araser le déversoir de Saint Jacques. La commune a jusqu'au 22 juillet pour trouver les fonds afin de le préserver.

Publié le 4 Mai 17 à 19:00

La passe à poisson réalisée en 1979 (au fond) pourrait être refaite et améliorée.

« On est pris par le temps ». Le 22 juillet prochain, la commune de Tréméven sera mise en demeure de lancer les travaux d’arasement du déversoir de Saint Jacques. Un ouvrage séculaire qui autrefois alimentait un moulin, puis une scierie et enfin une pisciculture qui a fermé ses portes en 2003.

 

Saumon et lamproie

Le droit européen et le droit français sont clairs : sans activité économique, le droit d’eau est caduc, et s’il est caduc l’arasement est obligatoire « pour rétablir la continuité écologique du cours d’eau » et laisser le passage libre pour le saumon, la lamproie, les sédiments

Le projet d’arasement, déjà évoqué en 2009, avait suscité un vif émoi dans la population et chez les élus. Une pétition avait même recueilli bien plus de signatures que d’habitants sur la commune.

 

Permettre le passage des espèces

Depuis, le site de l’ancienne pisciculture, qui appartenait à la communauté de communes Paimpol Goëlo (aujourd’hui GP3A), a été racheté pour l’euro symbolique par la commune de Tréméven. Objectif : avoir les coudées franches pour étudier une autre possibilité que l’arasement, « une mise en conformité qui permette le passage des espèces ».

Depuis plusieurs mois, la commune travaille en partenariat avec le Sage (schéma d’aménagement et de gestion de l’eau) et le Smega (syndicat environnemental Goëlo Argoat) pour étudier l’affaire. « Nous avons aussi impliqué les services environnement des deux communautés de communes (Leff Armor et GP3A), les kayakistes, les pêcheurs. » Et les services de la DDTM représentants de l’État.

 

Une brèche de 6 mètres

« Le Smega a fait un travail très poussé sur quatre hypothèses. » Celle qui a la faveur de la commune est un abaissement partiel de la hauteur du barrage avec une brèche de 6 mètres de large dans le déversoir pour construire une nouvelle passe à poissons de 28 m. « Il préserve les usages, la retenue d’eau baisserait de 40 cm mais l’activité kayak serait préservée. »

Le maintien des activités qui se fondent depuis des lustres dans le paysage serait donc garanti.

Nous sommes très attachés à Saint Jacques, tant pour son patrimoine naturel que bâti. La base de kayak y fait des entraînements techniques, les kayakistes de mer y viennent aussi l’hiver. Les centres aérés, les familles viennent pique-niquer… On a aussi des joutes nautiques très courues, c’est formidable !

 

« Qu’on travaille d’abord sur l’aval ! »

La commune ne se résout pas, surtout, à se soumettre à cette obligation quand « d’autres moulins existent en aval avec leur propre déversoir… »

Chantal Delugin poursuit :

Ce n’est pas parce qu’on va le supprimer à Tréméven que la continuité écologique sera rétablie, qu’on travaille d’abord sur l’aval !

À la demande du sous-préfet de Guingamp, le Smega va étudier le scénario de l’arasement total, afin d’évaluer les conséquences sur le paysage.

Mais Chantal Delugin en est persuadé, « on va se retrouver avec un marécage ! Et que vont devenir les berges ? Elles risquent de s’affaisser, cela fait plus de 200 ans que le déversoir existe… ».

 

Plus de 100 000 €

Les services de l’État jugent la solution de l’arasement partiel « acceptable » si la continuité piscicole est rétablie.

Seul point noir au tableau : le coût de l’opération exorbitant pour une petite commune de 300 habitants. « Selon les estimations, poursuit le maire, l’arasement simple coûterait 10 000 € et est subventionné à 80 % ; l’arasement partiel est estimé entre 128 000 et 150 000 €. » Bien évidemment sans subventions programmées.

Alors que le temps est compté, Tréméven veut mobiliser tous azimuts malgré la difficulté.

Le conseiller régional, Thierry Burlot s’est engagé à défendre le dossier auprès de l’Agence de l’eau qui pourrait apporter son soutien financier.

S’il obtient un feu vert, les deux communautés de communes, Leff Armor et la GP3A, pourraient suivre. « Mais il va falloir convaincre », prédit Chantal Delugin. Le président de Leff Armor communauté, Philippe Le Goux a déjà soutenu le projet en mettant en avant les compétences de la collectivité en matière de tourisme et d’activités sportives.

« Tréméven aura la fierté de mettre 10 000 € au pot, si on arrive à boucler le projet », sourit le maire.

Une réunion d’information ouverte au public aura lieu prochainement à Tréméven.

admin La Presse d'Armor

 

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