La DDT 42 s’active sans discernement ni robustesse

Une pluie de courriers adressés aux propriétaires d’ouvrages hydrauliques émane de la DDT de la Loire. Est-ce au titre de son devoir d’information ? C’est curieux car les généralités légales et administratives divergent d’un propriétaire à l’autre. Nous observons même des argumentaires différents pour un même ouvrage : l’un adressé au nu-propriétaire, l’autre à l’usufruitier, avec des exigences et des diagnostics discordants. Mais toujours une constante : priorité à la destruction des ouvrages baptisée pudiquement « effacement ». Une option lancinante, pesante que le législateur n’a pourtant jamais exigée dans le Code de l’environnement. Les courriers du 28 avril 2016 sont accompagnés d’un questionnaire DDT. Nous conseillons aux propriétaires d’envoyer le formulaire OCE que la DDT devrait suivre.

 

Une fatuité condescendante

«en tant que propriétaire de ce bief, mon service vous attribue la propriété du seuil de prise d’eau associé ».

Depuis quand la DDT primerait sur les notaires, les hypothèques, la jurisprudence et la notoriété acquisitive dans "l'attribution de propriétés"? Les propriétaires de moulins, les riverains et les magistrats savent qu’une jurisprudence constante leur reconnaît la propriété des ouvrages hydrauliques avec les droits et devoirs y afférents. En outrepassant ses prérogatives en matière de distribution de droits à la propriété, la DDT de la Loire prend de gros risques : nombreux sont les cas de démembrement fonciers où l’usinier conserve l’usage de dériver l’eau, alors que le fonds a été vendu à un tiers. En « attribuant la propriété » à Pierre ou à Paul sans rien avoir vérifié, la DDT s’arroge des prérogatives qu’elle n’a pas, et dont elle ne pourra pas assumer les conséquences juridiques.

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Tout est bon pour inquiéter voire menacer

«la réglementation en vigueur prévoit la réalisation d’études ».

Des études à la seule fin de produire des études, l’administration en est friande, mais cette exigence n'est pas fondée.

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 Les obstacles au franchissement à géométrie variable selon le statut du propriétaire

barrage de Chartrain 47m

Tous les propriétaires des petits obstacles au franchissement des espèces piscicoles situés sur le Renaison ont reçu un courrier de 3 pages pour mettre leur ouvrage en conformité avec les art L.214-17 et L.214-18… situés juste en aval immédiat de deux barrages contigus, l’un de 47 mètres de haut, l’autre de 55 mètres.

Pas question à l'OCE de critiquer la loi, dont acte.

Mais ce genre de courriers ne crédibilise pas les exigences aveugles et confirment une lecture dogmatique de la continuité écologique à géométrie variable, surtout quand le voisinage comporte des obstacles naturels infranchissables ou des barrages (dont l’intérêt général est par ailleurs incontestable).

barrage du Rouchain

 Le débit réservé

Un courrier de la DDT 42 du 29 avril 2016 adressé à un propriétaire de moulin. L’affaire en deux mots: le propriétaire d’un moulin fondé en titre, ne "propose" rien. En réponse aux courriers de la DDT, il reprend tout simplement les chiffres d’une station administrative toute proche, belle aubaine, ayant pris des mesures de débit depuis 40 ans… une implacable robustesse !

« Sur la détermination du débit réservé, je ne peux retenir votre proposition. Celle-ci ne correspond pas à la valeur plancher du 1/10ème du module évalué sans influence des prélèvements amont ».

Nous imaginons que la DDT42, dans une curieuse démarche "d'évaluation", a demandé à l’IRSTEA un calcul de débit spécifique (ce n’est évidemment pas l’IRSTEA qui est en cause, mais la question qui lui est soumise). Cette approche par le calcul du bassin versant est éminemment pertinente… mais uniquement en l’absence de données et d’impacts anthropiques.

En clair, et selon la DDT42, le module mesuré depuis des lustres doit être augmenté de la valeur des prélèvements amont pour définir le débit réservé que l’ouvrage doit impérativement respecter en aval. On croit rêver.

En poussant ce théorème innovant, si le volume des dits prélèvements amont est important (un cas fréquent), la valeur du débit réservé au droit de l'ouvrage sera supérieure au module interannuel du cours d'eau. C’est assez cocasse pour ne pas dire fumeux.

En termes de réciprocité, la DDT42 ouvre une perspective intéressante : quand il faudra calculer le débit dérivé turbinable d'un pétitionnaire, conviendrait-il d’ajouter au module interannuel, les volumes des prélèvements amont ? Il serait étonnant que ce genre de spécificité départementale fantaisiste soit validée par une autre DDT en France.

Pour un propriétaire qui ne demandait rien, la DDT 42 va unilatéralement présenter son propre dossier au CODERST le 6 juin 2016... pour ensuite prendre un arrêté préfectoral.

Le propriétaire n’aura plus qu’à exercer un recours. Des procédures chronophages qui encombrent les juridictions… sans effet positif sur la qualité de l’eau polluée des cours d’eau.

illustrations:
barrages de Chartrain (47m de haut) et du Rouchain (55m) pour alimenter Roanne en eau potable. La continuité écologique doit s'appliquer aux minuscules ouvrages situés juste en aval. C'est la loi.

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