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Cours d’eau : quand l’Administration tombe dans le fossé.

L’article de la Coordination rurale ne titre pas « quand l’Administration s’acharne et patauge ». Ces épreuves chronophages s’inscrivent probablement dans une application apaisée du code de l’environnement ?
Retour d’expérience : à ce jour et depuis 2015, aucune demande de correction de la cartographie des cours d’eau n’a été satisfaite lors d’échanges consensuels et professionnels. Nous ne rencontrons qu’obstructions et déni d’éléments pourtant incontestables (photos répétitives d’émissaire à sec pendant 6 mois etc…).
Et si visite il y a, et si l’AFB déniche ce jour-là 2 pinces d’une écrevisse californienne, faisant fi de l’instruction gouvernementale de 2015 et de la jurisprudence constante : « nous avons décelé de la vie biologique, donc il s’agit bien d’un cours d’eau ».
Nous reproduisons l’article ci-dessous, non pas en le « corrigeant » puisque nous en partageons tous les termes, mais en y apportant notre contribution [en rouge] pour faciliter la lecture.

 

Cours d’eau : quand l’Administration tombe dans le fossé !

Publié le 19.11.2019 dans 

En 2018, Monsieur Simon de la Selle, propriétaire d’étangs à Jouy-le-Potier, a obtenu l’annulation par le Tribunal administratif d’Orléans du classement de ses écoulements en cours d’eau effectué en 2015 par la DDT (voir notre article : Requalification d’un cours d’eau litigieux en fossé : un cas d’école).

Son succès était dû à l’expertise technique qu’il avait lui-même demandée, cela lui permettant de fournir au tribunal des arguments irréfutables.

Malgré cela, l’Administration a finalement fait appel et la Cour Administrative d’Appel de Nantes a donc réexaminé les faits.

Reconnaissant cette fois la présence d’écoulements sur la carte d’état-major, cela établissant l’existence d’un lit naturel à l’origine, la Cour constate néanmoins, sur la base de l’expertise hydrologique, l’absence de source et l’absence de débit suffisant.

Ne répondant qu’à 1 seul critère sur les 3 exigés par le code de l’environnement, l’écoulement litigieux ne peut donc pas être un cours d’eau et doit être requalifié par l’Administration en tant que fossé.

Bravo à M. de la Selle pour ce nouveau succès qui peut inspirer de trop nombreux agriculteurs et propriétaires dont les droits sont bafoués par l’Administration, par idéologie, par négligence ou inconséquence, (écoulements classés cours d’eau « administrativement », sans expertise de terrain), [par facilité (pour avoir repris in extenso la cartographie de l’IGN (pointillés bleus compris) et par abus de droit (pour que tous les écoulements d’eau soient assujettis au code de l’environnement)].

Arrêt de la Cour d’Appel Administrative de Nantes du 20 septembre 2019

 

Requalification d’un cours d’eau litigieux en fossé : un cas d’école

Publié le 12.06.2018

En 2015, Monsieur Simon de la Selle, propriétaire d’étangs à Jouy-le-Potier, découvre que des écoulements, qu’il sait être des fossés, apparaissent sur la nouvelle carte des cours d’eau dressée par la DDT du Loiret. Il demande alors à l’administration de requalifier les écoulements litigieux en fossés. Suite aux refus successifs de la DDT, il forme un recours au tribunal administratif et obtient gain de cause.

Le « classement » d’un fossé sur la carte « police de l’eau » (fait grief) peut être attaqué, même sans qu’un aménagement soit prévu sur l’écoulement litigieux.

Selon le préfet, la cartographie n’a qu’un « caractère indicatif » [itératif et non opposable nous avait-on dit].  Dans la mesure où il n’y a pas projet d’aménagement (curage, recalibrage…), la carte ne porte pas préjudice [pas d’accord sur cette appréciation: tel l’exemple de réglementation routière sur une voie à 600 km de chez soi ; elle est conforme ou entachée d’une erreur manifeste d’appréciation, peu importe que nous l’empruntions ou pas]. La seule contrainte est alors le respect du débit réservé, [elle est loin d’être anodine cette contrainte, car l’AFB dresse des procès-verbaux en cascade] c’est-à-dire l’obligation de laisser s’écouler à l’aval un débit au moins égal au débit entrant en période d’étiage.

Mais cette contrainte signifie bien que la carte des cours d’eau n’est pas sans impact sur le propriétaire ! Pour le tribunal, cette carte n’est donc pas seulement destinée à servir de point de référence dans l’application de la réglementation. Elle a bien des conséquences sur la situation juridique des écoulements concernés, comme le préfet le constate lui-même.

En d’autres termes, la cartographie des cours d’eau « police de l’eau » est donc bel et bien opposable et n’a pas un caractère purement indicatif dès lors qu’elle produit des effets sur la situation juridique du propriétaire. Elle peut être attaquée par tout intéressé, même sans projet d’aménagement (ou d’intervention) particulier sur l’écoulement en question. [il est même prudent d’anticiper soit un projet d’aménagement soit un reproche ou pire : un RMA -rapport de manquement administratif- sur le défaut d’entretien courant du cours d’eau qui n’en est pas un]

Contrairement à ce que prétend l’administration, il n’est donc pas nécessaire d’attendre d’avoir un projet d’aménagement pour attaquer l’insertion de certains écoulements sur la carte.

Face au refus de la DDT de donner suite à la demande de requalification du cours d’eau en fossé, il ne faut pas hésiter à recourir à une expertise indépendante.

En l’espèce, l’erreur d’appréciation du préfet est flagrante : les écoulements litigieux ne respectent aucun des 3 critères de qualification d’un cours d’eau posés par la jurisprudence et repris par la loi « biodiversité ». Le tribunal annule donc le « classement » en fossé.

En effet, il n’y a aucun lit permanent, naturel à l’origine, comme le montrent le cadastre, la carte de Cassini et la carte d’État-major. [il faut faire très attention à l’usage de ce genre de preuve réversible et les considérer par un faisceau d’indices croisés corroborant l’expertise du site, car ces trois cartes peuvent être précises selon les endroits et tout aussi imprécises ailleurs; nous observons souvent le liseré d’un écoulement d’eau sur la carte de Cassini, pourtant non alimenté par une source et ne présentant pas un débit suffisant une majeure partie de l’année, tout simplement parce que ce liseré de ~1750 symbolise aussi le fond du talweg].

Il n’y a aucune source, les seuls écoulements observés parvenant des bouches de drainage et du trop plein d’étangs.

Enfin, l’expertise indépendante a conclu en l’absence de débit suffisant une majeure partie de l’année. [rappelons que le débit se mesure -voir la méthodologie de l’AFB- sur 5 ans ; Quand la DDT rechigne puis s’oppose à rectifier la cartographie au motif aléatoire que « le cours d’eau a été expertisé » (en clair, une visite de l’AFB peut-être le lendemain d’un orage) est un argument très éloigné d’une expertise Q5 digne de ce nom].

De son coté, l’administration ne s’est basée que sur un faisceau d’indices, à partir de cartes et de bases de données, sans prendre la peine de se déplacer sur le terrain.

En cours de recours contentieux, ne pas oublier de demander que le tribunal administratif enjoigne au préfet de procéder à la requalification, sous contrainte de délai.

 

Mise à jour au 22 juin 2018 : insatisfait d’un tel jugement mais visiblement hésitant, le Ministère fait finalement appel auprès de la Cour Administrative d’Appel de Nantes, appel enregistré à la toute fin du délai de recours, le 5 juin 2018. Affaire à suivre…

 

À télécharger : Jugement du tribunal administratif d’Orléans du 3 avril 2018