Cours d’eau : l’administration a créé la pagaille avec une politique apaisée imposée.

Défaut de gouvernance, dogme, non-respect de la loi définissant un "cours d’eau", l’administration dans son obstination a réussi à exaspérer tous les usagers, élus condamnés pour avoir curé un fossé compris.
Rappel clair : deux cartographies départementales sont indispensables.
L’une pour les cours d’eau (volet physique), l’autre à usage agricole (volet environnemental)  BCAE Bonnes conditions agricoles et environnementales et ZNT Zones de non traitement).
En mélangeant et en entretenant la confusion dans la présentation et en inventant des « cours d’eau BCAE » l’administration suscite les contentieux de la part de ceux qui estiment le "cours d’eau" strictement  inapproprié (riverains, propriétaires de moulins, forestiers et d’étangs), des agriculteurs exposant des considérations BCAE et ZNT trop lourdes et FNE jugeant que tout le monde à tort.

La cartographie des cours d’eau résulte d’un copié/collé de la cartographie de l’IGN avec la forte tentation « d’expertiser » encore plus de ruisseaux en tête de bassin versant pour « en ajouter », à seule fin d’assujettir tous les écoulements d’eau aux exigences du Code de l’environnement (c’est le dogme).

La cartographie à des fins agricoles, sur la pression des agriculteurs, a tendance à réduire ce linéaire pour « en enlever » pour ne pas être en porte à faux vis-à-vis de la PAC (Politique agricole commune).

C’est là où le bât blesse car le choix contraire aurait pu se produire (c’est la gouvernance) :
1) enlever de la cartographie physique tout ce qui ne permet pas de caractériser légalement un « cours d’eau » selon les trois critères cumulatifs précis (lit naturel à l’origine, alimentation par une source, débit suffisant une majeure partie de l’année).
A ce titre, les riverains exercent des recours judiciaires légitimes puisque l’administration fait obstruction quasi systématique à reconnaître qu’un écoulement d’eau ou un lit naturel à sec 4 à 6 mois/12 ou un fossé artificiel ne sont pas des « cours d’eau ». Cette obstination généralisée, insupportable, illustre une politique dite « apaisée » imposée.

2) et pourquoi pas si l’administration prétend agir en faveur de la biodiversité et la qualité de l’eau, augmenter le linéaire des vrais cours d’eau pour des raisons environnementaux aux émissaires et talweg en amont ?
En effet, en traitant avec des produits chimiques un talweg, une parcelle dont le fond a été busé sur un linéaire important, on sait qu’à la première pluie, ces produits se retrouveront obligatoirement par gravité dans les buses, les drains, le ruisseau puis le vrai cours d’eau en aval. A ce titre FNE engage des recours gracieux sur 45 départements et judiciaires sur 25 autres.
C’est un choix de gouvernance entre une France sans paysans et des ONG écologistes subventionnées.

Dans un dialogue d’autistes, la seule issue offerte aux usagers est d’engager des recours pour que le juge, impartial, lise le droit puisque des interprétations le bafouent.
La perte de confiance des usagers de l’eau en leur administration est désormais totale depuis 2012.

Nous reproduisons cet article de Reporterre… qui mélange absolument tout.
Le plus important à nos yeux est d’insister :
1) sur la définition d’un cours d’eau qui n’est pas du tout ambigüe comme l’expose cet article, mais au contraire très claire.
Même en étant très claire, la Police de l’eau rechigne et fait preuve de très mauvaise foi pour admettre qu’un filet d’eau dont le débit serait inférieur à 12l/s, qu’un ouvrage créé de la main de l’homme ou qu’un lit naturel à sec n’est pas un cours d’eau.

2) la carte IGN, aussi précieuse soit-elle, n’a aucune vocation à caractériser un cours d’eau.

Illustration de l’obstination administrative:

Pierre Vallet, Maire de Brebotte, conteste le classement en cours d’eau d’un fossé créé par la commune en 2005.
Photo Aurélien Breton.

Le gouvernement laisse les cours d’eau à la merci des pesticides

31 janvier 2020 

L’usage des pesticides augmente en France mais la réglementation protégeant les points d’eau s’affaiblit. En cause un arrêté ministériel flou, une définition des cours d’eau ambiguë et des pressions du lobby agricole. Des associations environnementales ont choisi le terrain juridique pour protéger les écosystèmes aquatiques.

Après des mois de tergiversation, le gouvernement a enfin pris un arrêté pour limiter les épandages de produits phytosanitaires près des habitation. Les riverains devraient être mieux protégés face aux pesticides. Mais qu’en est-il de l’eau que nous buvons ? À l’origine, notre loi sauvegarde les rivières, canaux et autres lacs des contaminations en interdisant à leurs abords tout versement de substances biocides. C’est ce qu’on appelle les « zones de non-traitement » (ZNT). Mais depuis quelques années, le lobby agricole pousse de tous les côtés afin d’affaiblir cette législation, qu’il juge complexe et contre-productive.

Comme Reporterre l’avait raconté, la FNSEA — le syndicat agricole majoritaire — et ses alliés ont d’abord choisi d’attaquer la définition même d’une rivière. Car, sans le statut protecteur de « cours d’eau », un écoulement se retrouve hors des radars des lois encadrant les pratiques agricoles et limitant les travaux de calibrage, les constructions et autres barrages hydrauliques).

Dans les faits, une partie de la profession agricole a exigé — et obtenu — une cartographie hydrographique, département par département, se fondant sur une définition au rabais d’un cours d’eau, excluant d’innombrables ruisselets mais également des canaux pluriséculaires, comme dans le marais poitevin. À force de pression, des centaines de kilomètres d’écoulements ont été purement et simplement gommés. Le hic, pour les tenants de ce travail de détricotage — ou de simplification, c’est selon — : ces nouvelles cartes, qualifiées « police de l’eau », n’avaient alors aucune valeur juridique, elles n’étaient qu’indicatives. L’État est donc venu parachever le sabordage. En mai 2017, le gouvernement a ainsi pris un arrêté « relatif à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants », interdisant comme il se doit l’usage de pesticides aux abords des points d’eau… tout en restant très flou quant à la définition de ces points d’eau. Pire, il a renvoyé la patate chaude aux préfets.

« Dans le contexte actuel de tensions avec la profession agricole » 

« Le gouvernement appelait les préfets à préciser le champ d’application de cet arrêté, mais beaucoup en ont profité pour redéfinir les points d’eau, en réduisant au passage le linéaire protégé », résume Hervé Hourcade, juriste à France Nature Environnement Midi-Pyrénées. D’après l’association environnementale, le préfet du Tarn-et-Garonne a ainsi fait disparaître des cartes 30 % des aires préalablement protégées, celui d’Indre-et-Loire a lui rayé 43 % de ces zones.

Outre nos fameuses cartographies, il existe en effet un autre outil précieux pour référencer les points d’eau : les cartes IGN au 1 : 25.000, qui identifient tous les éléments du réseau hydrographique en bleu, mais ne sont pas toujours à jour. « L’idéal est donc de prendre en compte ces deux référentiels, qui se complètent bien », précise Benjamin Hogommat, également juriste à France Nature Environnement, dans les Pays de la Loire. Sauf que les préfets ont eu tendance à ne considérer qu’une des deux cartographies.

Ainsi, dans le Tarn-et-Garonne, une note interne de la direction départementale des territoires, datée du 24 mai 2017, reconnaissait d’importantes lacunes dans le classement des cours d’eau alors en vigueur… mais recommandait au préfet, « dans le contexte actuel de tensions avec la profession agricole », de s’en tenir « au maintien de la définition actuelle des points d’eau, sans inclusion d’éléments nouveaux ». Résultat : plus de 300 km d’écoulements ainsi que la totalité des plans d’eau de moins de 10 ha n’ont pas fait l’objet de zones de non-traitement. « Dans les départements où le monde agricole représente un lobby et exerce une pression sociale forte, les cartographies adoptées ont réduit drastiquement le linéaire protégé », conclut Rémy Arsento, agent de l’Office français de la biodiversité et syndiqué au SNE-FSU.

 

Dans l’Aude, le préfet a ainsi pris un arrêté en juillet 2017 : il a retenu la cartographie « police de l’eau » comme référence, qui ne prend notamment pas en compte les nombreux canaux qui parcourent la plaine viticole. Ainsi, d’après l’analyse transmise par FNE Languedoc-Roussillon, sur les 6.412 km d’écoulements recensés par l’IGN dans le vignoble audois, plus de la moitié — 55 % — « ne sont pas identifiés comme cours d’eau », dans la cartographie rendue officielle. Par conséquent, seuls 2 % des surfaces agricoles sont actuellement en surface de non-traitement, contre 5 % si le préfet s’était fondé sur la carte IGN.

Les canaux ne sont pas des cours d’eau, direz-vous ! Certes, mais ils sont connectés au reste du réseau hydrographique. Et les pesticides ignorent les frontières juridiques. « Une ZNT n’est pas faite pour casser les pieds aux agriculteurs, mais pour protéger la ressource en eau, rappelle Rémy Arsento. Pour préserver efficacement une masse d’eau, il faut travailler sur l’ensemble du bassin versant. » Or « les eaux audoises souffrent d’une importante pollution aux produits pharmaceutiques », souligne Olivier Gourbinot, juriste à FNE Languedoc-Roussillon. Le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) Rhône Méditerranée, qui pilote les politiques de l’eau dans le bassin, identifie d’ailleurs l’Aude « comme nécessitant des actions pour réduire la pollution aux pesticides ».

Considérant qu’une grande partie des écoulements non identifiés dans la cartographie — et donc sans ZNT — « présentent une exposition forte à la pulvérisation de produits phytopharmaceutiques », Olivier Gourbinot a attaqué l’arrêté de l’Aude en mai 2018. Au total, en France, 45 recours gracieux ont été adressés à des préfets, puis 25 recours contentieux ont été engagés par des associations membres de FNE. Autrement dit, dans près de la moitié des départements, les décisions préfectorales ont engendré, selon l’ONG environnementale, une situation de « régression » de la protection des écosystèmes.

« Le plus simple aurait été que le gouvernement demande aux préfets de rectifier leurs arrêtés » 

C’est d’ailleurs ce qu’a reconnu le Conseil d’État dans une décision du 26 juin 2019. En s’appuyant sur « le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante », les juges ont ainsi estimé que « les dispositions [des arrêtés] ne peuvent être regardées comme conduisant, par elles-mêmes, à une protection moindre de l’environnement ». D’après eux, l’affaire est donc entendue : les points d’eau à protéger sont ceux de la cartographie « police de l’eau » ET des cartes IGN.

Grâce à ce coup de pouce du Conseil d’État, les associations environnementales ont à ce jour fait reconnaître l’illégalité de 12 arrêtés, dont celui de l’Aude. « Les tribunaux administratifs n’annulent pas complètement les textes, mais ils les complètent pour qu’il n’y ait pas de régression », se réjouit Hervé Hourcade. Reste que nombre d’arrêtés préfectoraux insuffisants demeurent toujours en vigueur. « Le plus simple aurait été que le gouvernement demande aux préfets de rectifier leurs arrêtés, soit en prenant une instruction ministérielle, soit en modifiant son arrêté de mai 2017 », souligne Benjamin Hogommat. Ce qu’il n’a manifestement pas fait. En attendant, des milliers d’écoulements se retrouvent sans protection face aux pulvérisateurs.

 

« Heureusement que les associations environnementales font leur job », constate Rémy Arsento. D’après lui, depuis plus d’un an, les contrôles sont rendus plus difficiles, faute de base réglementaire solide. Or, « sans contrôle par les inspecteurs de l’environnement, dit Olivier Gourbinot, la réglementation ne sert à rien »« C’est décourageant de voir des lois protectrices détricotées par les pouvoirs et les lobbys locaux », déplore l’agent de l’OFB.

Si le bon respect de la réglementation semble être un levier indispensable pour protéger les cours d’eau, « il s’agit aussi d’accompagner les agriculteurs dans la transition », insiste Sandrine Reverchon-Salle, directrice des politiques d’intervention de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne. Grâce aux redevances payées par les usagers de l’eau, l’Agence finance ainsi la conversion à l’agriculture bio à hauteur de 15 millions d’euros par an, et accompagne, pour 8 millions d’euros, la réduction d’usage des pesticides.

Pour autant, la politique de la carotte et du bâton trouve aussi ses limites. « On ne détient pas tous les leviers, prévient la directrice. Tant que la politique agricole commune (PAC) ne soutient pas massivement la transition agroécologique, tant que les marchés seront mondialisés, orientés vers l’export, poussant à la compétition entre les systèmes agricoles, on ne parviendra pas à grand-chose ».

 

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