Cours d’eau : dossier bloqué* ? Allez au contentieux.

Entre la DDT qui qualifie un petit pipi d’écoulement de "cours d’eau" à seule fin de l'assujettir au code de l’environnement alors que la réalité du terrain prouverait le contraire, nonobstant une jurisprudence constante qualifiant les critères de caractérisation d’un cours d’eau… rien ne va plus. Le juge a dit au préfet du Loiret que ça ne marche pas comme ça dans la vie !
Selon une DDT poussée dans ses retranchements argumentaires : "si vous n’êtes pas content, vous allez au TA (tribunal administratif)". Dont acte.
C’est le new-concept de la concertation et de la co-construction.
Une politique "apaisée", n’est-ce pas ?

 

L’AFFAIRE

Le préfet du Loiret refuse de requalifier un cours d’eau en fossé le 05/08/2015 et le 11/03/2016.

Le propriétaire fut donc contraint de saisir le TA (Tribunal administratif) d’Orléans le 15/04/2016.

Par trois mémoires en défense enregistrés les 23 juin 2016, 10 octobre 2016 et le 24 janvier 2017, Ie Préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Mais le préfet n’est pas un juge.

Le préfet soutient que la requête serait irrecevable en raison du caractère de mesure préparatoire de la cartographie, qui n'est pas un acte faisant grief; qu'à titre subsidiaire, les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.
Il a perdu son procès le 03/04/2018.

Son Ministre de la transition écologique et solidaire (la Direction de l’eau et de la biodiversité) a interjeté appel du jugement. En appel, le Ministre soutient qu’il n’est pas établi que la minute du jugement attaqué aurait été signée (il faut faire feu de tout bois).

La CAA de Nantes (Cour administrative d’appel) dans son arrêt du 20 septembre 2019 a débouté et condamné le Ministre. L' Etat doit payer.

DISCUSSION

En clair : l’administration engage une procédure bancale improbable, budgétivore en termes de frais de déplacements, personnels dédiés à la rédaction de mémoires non robustes, surcharge et encombrement des juridictions et in fine, l’Etat est condamné à payer une indemnité et les dépens.
C’est la multiple peine pour le contribuable.
C’est surtout le parcours du combattant pour l’usager/riverain d’un "non cours d’eau", de faire valoir l’évidence contre une croyance dogmatique qui a fait un copié/collé de la carte IGN.

CONCLUSION
Le préfet du Loiret, dans son obstination à refuser de requalifier un "cours d'eau non domanial" en fossé, confirmant une décision unilatérale de ses services (DDT-AFB), ne tenant aucun compte du site, illustre la difficulté pour un propriétaire de faire admettre la réalité du terrain et la jurisprudence aux services administratifs en charge de l’eau.
Un abus de pouvoir et un blocage inadmissibles.
La doctrine administrative est ainsi résumée: « la cartographie est erronée, mais c’est la cartographie ; si vous n’êtes pas content, vous saisissez le juge ». Ce refus d'une instruction loyale qui se répand créée une iniquité flagrante: chaque propriétaire n'a pas forcément envie ni les moyens de porter son dossier en justice pendant de nombreuses années.
Même si le juge donne, plus souvent qu’il n’y parait, tort au Préfet et au Ministre de l’écologie !

 

(*) on pourrait presque estimer que tous les dossiers "sont bloqués" par principe. Quand un propriétaire ou son représentant demande à la DDT (seul service interlocuteur) de modifier la cartographie pour tel ou tel tronçon, le refus est quasi systématique en première intention et de se retrancher sur une "expertise" future... confirmant toujours le statut de cours d'eau.
Nous appelons aux témoignages de cas où une DDT aurait répondu "ok, nous procéderons à la modification éventuelle après validation par notre service".
Il y a pourtant chez les pétitionnaires des gens tout aussi qualifiés qu'un technicien de DDT ou de l'AFB (sans réprouver un instant la formation et l'expérience d'un technicien, simplement pour rappeler que son statut ne lui confère pas plus de compétences que celles du pétitionnaire).

Il y a quelque chose de vicié intellectuellement dans la procédure: certains départements mentionnent d'une autre couleur des linéaires "à expertiser". Ce sont toujours des tronçons en tête de bassin versant pour en "classer plus", même si l'aval est déjà classé "cours d'eau" par erreur manifeste d'appréciation.
La rubrique "à expertiser" devrait concerner uniquement les tronçons litigieux.
Les non-cours d'eau ne devraient pas figurer sur la cartographie au lieu de suggérer qu'ils pourraient devenir "cours d'eau".
Il n'est pas question d'ergoter, mais quand vous êtes devant le juge qui n'est pas un expert en hydraulique rurale, une cartographie maximaliste même erronée lui sert de référence.
Si les choses ne bougent pas vers une cartographie itérative, fiable et loyale (pour l'instant, nous sommes très loin du compte depuis 10 ans), la mauvaise foi du service instructeur sera clairement établie.

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