Gestion des cours d’eau sarthois : 7 millions d’euros pour des poissons fantômes

Notre association (ASMR 72), créée il y a plus de 20 ans, a pour objectif la sauvegarde des moulins et rivières.  A l’origine, les membres étaient essentiellement des propriétaires de moulins. De nombreux riverains, agriculteurs, pêcheurs, maires et autre élus nous ont rejoints.

Alors que le Département mène une politique raisonnée concernant le patrimoine sarthois, la politique de gestion des cours d’eau est tout à fait incohérente, mettant en danger les ouvrages  construits au cours des siècles (moulins, seuils-déversoirs, canaux de dérivation, étangs …).

Nous estimons que les dépenses programmées pour la construction de passes à poissons sont indécentes en regard des besoins, de l’absence de garantie de résultat et du contexte économique.

Un vrai gâchis sur Sarthe Aval avec des investissements énormes et injustifiés.

D’après les informations du service hydraulique, 16 passes à poissons de 400.000 € chacune et spécifiques à l’alose, la lamproie et l’anguille, sont construites ou programmées sur Sarthe Aval.

En ajoutant les 2 passes à poissons semblables déjà installées sur le Loir, cela correspond à un investissement de 7.200.000 €.

Cette somme correspondrait à environ la construction de deux stations d’épuration semblables à celle récemment réalisée à Beaumont sur Sarthe et capable d’assurer l’épuration des eaux usées de 1000 équivalents habitants. 

L’Europe invoquée : « Bruxelles impose des passes à poissons » 

lue-exige.jpg (JPEG Image, 960 × 540 pixels)_2013-11-16_22-34-21

Cette formulation est mensongère : la Directive Cadre Européenne impose le retour à un bon état écologique, la qualité de l’état écologique étant définie par des  paramètres biologiques, hydrologiques et chimiques.

Concernant les polluants, l’objectif est de réduire, voire de supprimer le rejet de substances prioritaires (41 à ce jour).

Construire des passes à poissons spécifiques et onéreuses ne correspond en aucun cas à « une norme imposée par Bruxelles ». C’est le choix des autorités en charge de l’Eau.

Une telle  désinformation, attribuée à l’Europe, est dangereuse car elle risque d’inciter certains citoyens à vouloir en sortir.

Des poissons fantômes…mais pas tous

Si l’anguille est bien présente dans nos cours d’eau, l’alose poisson de la famille de la sardine et du hareng  a disparu depuis près de deux siècles et il ne semble pas qu’il y ait de preuve de  présence de la lamproie dans nos cours d’eau. Les édits royaux n’y faisaient même pas référence.

L’anguille qui a pullulé dans nos cours d’eau avant qu’ils ne soient pollués, a démontré depuis longtemps sa capacité à franchir nos petits ouvrages Sarthois.

Le silure fait fi des ouvrages et prolifère en dévorant les espèces amphihalines. Les crues saisonnières permettent à toutes ces espèces piscicoles de circuler d’un bassin à l’autre.

Par ailleurs, au niveau des moulins, il existe des canaux de décharge et/ou de dérivation que ne manquent pas d’emprunter les poissons qui y trouvent d’ailleurs refuge pour se reproduire.

La lamproie dont les tissus sont riches en lipides, fixe facilement les substances toxiques. Elle serait probablement impropre à la consommation si elle se hasardait dans un milieu pollué.

Ni les objectifs espérés, ni la perspective de subventions ne justifient de tels investissements

Dans l’article du Maine libre du 20 octobre 2013 intitulé « Trois millions pour les poissons », M. Levasseur, agent du service hydraulique du Conseil Général, indique : « La plupart du temps, de simples échancrures pratiquées ou quelques vannes ouvertes suffiront à adapter les ouvrages aux exigences Européennes »

3-millions-pour-les-poissons.jpg (JPEG Image, 960 × 751 pixels)_2013-11-16_22-36-41

D’une part, cette technique d’abaissement des niveaux d’eau par effacement des barrages est en contradiction avec la Directive Cadre Européenne spécifiant qu’« il est nécessaire d’intégrer la protection et la gestion écologique viable des eaux dans les autres activités communautaires telles que l’énergie, la politique agricole, celle de la pêche, la politique régionale et celle du tourisme ».

D’autre part, le 21 mai 2013 à l’Assemblée Nationale, Madame Batho alors Ministre de l’Ecologie, interpellée par Madame Dubois Députée indiquait  « Les projets de destruction des barrages devraient être instruits avec discernement mettant fin à la logique aveugle de la continuité écologique ».

Pour un meilleur usage des fonds publics

Les fonds en provenance de l’Agence de l’Eau, du Département, voire de l’Europe, sont des fonds abondés par les particuliers et les contribuables. Par conséquent, ils ne doivent pas être détournés des missions qui ont justifié leur prélèvement (assainissement, épuration, distribution, lutte contre les inondations …).

Les élus devront répondre devant leurs électeurs des investissements aberrants en regard des véritables besoins, des enjeux économiques, énergétiques et patrimoniaux du département.

Aussi, ce type de communication publique sur le sujet sensible de la politique de l’eau s’adresse surtout aux élus en charge de la politique de l’eau. Qu’ils évitent de se défausser sur l’Europe pour tenter de justifier des dépenses très importantes qui n’amélioreront pas la qualité de l’eau.

ASMR 72

.

Abonnez vous à notre flux d'articles ici

Les commentaires sont fermés.