Quand le Président d’une Collectivité investit dans l’hydroélectricité

A l’aune de la transition énergétique, Gérard Beaud, Président de la Communauté des Rives du Haut Allier décide d’investir à juste escient dans la production hydroélectrique. Par une approche viciée, le dogme en France consiste plutôt à inciter les Collectivités territoriales à acquérir des ouvrages hydrauliques… pour les détruire. De lourdes dépenses publiques à fonds perdus. Et les associations environnementales trouvent normal que le contribuable paye. Dans la région du Haut-Allier, là plus qu’ailleurs, l’hydroélectricité est un sujet tabou. Et à Chanteuges, les associations environnementales déplorent que l’investissement de ce projet valorisant ne rapporterait pas suffisamment.

Notons que la DDT 43 a dû valider ce dossier, qui dans d’autres départements relève du parcours du combattant. Le moulin, compte tenu de son statut de fondé en titre était « réputé régulier et autorisé » au titre du Code de l’environnement. Si les ouvrages restent présumés conformes à ceux d’origine, sans modifications des cotes ni augmentation de la consistance légale, Il n’y a pas de formalité particulière à solliciter auprès de la DREAL au titre du Code de l’énergie.

Encouragements à Gérard Beaud qui, s’il maîtrise le volet technique, va devoir affronter la nature humaine, l’obscurantisme et la mauvaise foi, au mépris de l’intérêt général.

 

Publié par La Montagne le 15/11/2017

Le chantier de la microcentrale hydroélectrique suscite la polémique

La communauté de communes a lancé l’installation d’une microcentrale hydroélectrique à Chanteuges (43). Les opposants se mobilisent.

Depuis mai dernier et l'assèchement du béal traversant le bourg de Chanteuges, le projet de microcentrale hydroélectrique mené par la communauté de communes des Rives du Haut Allier, a vu fleurir les détracteurs. Plusieurs associations (*), le conseil municipal de Chanteuges et le conservatoire national du saumon sauvage ont récemment organisé une réunion publique pour dénoncer un projet qu'ils qualifient volontiers « d'opaque ». Gros, plan, avec des membres du collectif, sur les points d'achoppement.

1 Droit d'eau.  Il a été reconnu par le préfet de la Haute-Loire et son existence légale avait été prouvée, pour le Seccom, par des recherches réalisées par une généalogiste, Isabelle Malfant-Masson. Il donne au propriétaire des moulins le droit d'utiliser jusqu'à 1.500 l/s (litres par seconde) prélevés sur la Desges par l'intermédiaire du béal. Les opposants ont une interprétation toute différente du rapport de la généalogiste. « Le droit en titre n'est pas clairement établi, insiste Robert Joumard, l'un des riverains du béal. Il n'est pas prouvé qu'il s'agisse bien des moulins auxquels sont liés ce projet. De plus, les premières valeurs écrites, fixant la consistance légale de ce droit, ne dépassent pas 800 l/s.Le droit en titre pas clairement établi »

• Note OCE : le chiffre de 800l/s mentionné dans les archives n’exprime que la valeur dont l’usinier de l’époque avait besoin et valorisait. La consistance légale théorique actuelle résulte d’un calcul et de la capacité maxi de la prise d’eau.

PMB = G x Q x H    

Q max : débit maximum,

H : chute

PMB : puissance maximale brute exprimée en kilowatts

 

2 Manque d'information et de concertation. Selon les opposants au projet, dont le maire de Chanteuges, l'actuel président de la Communauté de communes, Gérard Beaud, avait annoncé, il y a un an, une réunion publique sur le sujet : « Au final, il n'y a eu qu'une réunion avec le conseil municipal, sans chiffre ni donnée. Puis une autre avec une partie des propriétaires de parcelles riveraines. Pour obtenir les documents de l'appel d'offres, il a fallu que je m'y reprenne à trois fois… » Résultats : la commune n'a jamais rendu d'avis favorable au projet et a dû mettre en attente la demande de permis de construire déposé en juin 2017, par manque de pièces complémentaires.

3 Manque d'études. « Aucune étude de l'impact du projet de microcentrale sur l'environnement n'a été menée, que ce soit sur la biodiversité, la pêche, la qualité du patrimoine architectural et touristique de Chanteuges, le bruit ou les bâtiments », déplorent les opposants. Pour Patrick Martin, directeur du Conservatoire nationale du saumon sauvage, « à aucun moment il n'a été question d'étudier l'impact possible sur la pisciculture. » Il pointe l'absence de by-pass qui, dans le cas d'un arrêt de la microcentrale, créerait un temps de latence avant que l'eau du béal ne soit déversée dans la Desges, réduisant le débit de celle-ci au seuil minimum réservé.

• Note OCE : rappelons que la production hydroélectrique ne modifie pas le débit d’un cours d’eau et ne pollue pas l’eau comme certaines activités le font.

Le bruit et les vibrations entraînées par la turbine inquiètent également les opposants, qui soulignent les nuisances dont souffrent les habitants proches des turbines de Prades.

4 Les travaux. Le chantier a débuté. Après l'assèchement du béal a été lancée l'installation d'une conduite enterrée. Des travaux qui, ont des effets sur les constructions : « l'assèchement des sols provoque un affaissement du terrain et fait bouger les maisons. »

• Note OCE : le Président de la Comcom va entendre par symétrie, tous les arguments qui lui auraient été reprochés en cas de destruction des ouvrages hydrauliques. Rappel à ce riverain : l’usinier n’a aucune obligation légale de maintenir de l’eau dans son bief. Lui seul en a l’usage.

5 Les finances. Ce projet a été imaginé pour combler le déficit engendré par l'auberge de Chanteuges. Les opposants estiment les coûts d'investissement sous-estimés : « De 2015 à 2017, ils sont passés de 550.000 € à près de 750.000 € et ils pourraient grimper à environ 1,2 million d'euros si l'on ajoute les frais de raccordement au réseau Enedis, la rénovation de la passe à poisson, l'achat du moulin et des études et maîtrise d'œuvres. » Enfin, concernant le temps d'amortissement de la centrale, ils réfutent l'estimatif à dix ans présenté par la com'com. Ils estiment que la baisse régulière, au fil des ans, du débit de la Desges n'a pas été prise en compte : « La microcentrale n'arriverait jamais à tourner, comme annoncé, à 1.500 l/s pendant dix mois sur douze. Depuis juillet, nous sommes à moins de 500… ».

Note OCE : Pour une fois qu’une Collectivité procède à un investissement pertinent dans une production non polluante, les écologistes lui reprocheraient de ne pas être immédiatement et insuffisamment rentables ? Il faut le comparer à des dépenses publiques considérables qui ne produisent jamais 1€.

6 Les autorisations. Associations, mairie, riverains et CNSS auraient aimé voir davantage d'autorisations, notamment pour la construction du dégrilleur. La confection de son déversoir en béton a en effet nécessité de travailler non plus sur le béal, mais sur les berges de la Desges.

• Note OCE : les tiers implorent un choc de simplification complication ? Inutile de solliciter d’autres autorisations qui n’ont pas lieu d’être. Ce n'est guère crédible.

(*) Européan Rivers Network, Chanteuges préservation du patrimoine, Fédération de pêche de Haute-Loire, Association protectrice du saumon, association internationale du saumon Atlantique, Frane et REN Haute-Loire.

Le président de la Comcom répond aux opposants

Pour Gérard Beaud, président de la Communauté de communes de Rives du Haut-Allier, c'est un sentiment d'incompréhension qui semble dominer face aux arguments des opposants au projet. Il répond à leurs inquiétudes.

Informations. « Le projet de microcentrale a été lancé par le Seccom en février 2015. Dès lors, nous avons eu notamment une réunion avec le président de l'association de pêche. Il y a eu des délibérations au Seccom, dont faisait partie un adjoint de la mairie de Chanteuges. En novembre 2016, nous avons rencontré le conseil municipal pour présenter les trois scénarios possibles pour cette installation. Lors de la réunion avec les propriétaires riverains, nous avons répondu aux questions qui nous étaient posées, sur les aspects paysagers, le bruit et l'enterrement de la conduite. Sur ce dernier point, nous avions demandé à la mairie ce qu'elle voulait en terme d'aménagement paysager. Par ailleurs, la partie du béal à l'air libre dans le bourg était recouverte de végétation et invisible jusqu'à ce que les travaux débutent… Enfin, nous avons eu une réunion quand le maître d'œuvre a été choisi. À l'époque, tout le monde avait eu les réponses suffisantes… »

Le bruit de la turbine et les vibrations. « Nous sommes allés mesurer le bruit de l'eau à l'endroit le plus bruyant du béal, la chute d'eau du moulin : 96 décibels. Avec une turbine dans un bâtiment, enterrée, on sera à moins. Quant aux vibrations, il n'y a pas eu d'étude. Mais vu la masse d'eau, il n'y aura pas de vibration perceptible.

L'alimentation en eau de la salmoniculture. « Il n'y aura pas de problème sauf si la salmoniculture prélève plus que ce qui est autorisé. Un débit minimum réservé de 440 l/s sera laissé dans la Desges quoi qu'il arrive. On ne dérogera pas aux préconisations. Après, si M. Martin a des réclamations à faire, il faut qu'il s'adresse aux services de l'État. »

Le coût. « On n'arrivera pas à 1 million ou 1,2 million comme annoncé par nos détracteurs. Le vrai chiffre, c'est 750.000 €, il n'y en aura pas d'autre. C'est vrai que cette somme n'intègre pas la passe à poisson, dont on ne pourrait assurer le coût sans ce projet, ni l'achat du moulin. »

Les dégâts sur les maisons. « D'autres riverains sont contents car cela assèche les sols… Mais sur ce point, je ne vois pas pourquoi on incrimine la communauté de communes. Si les entreprises font des malfaçons, ce sera de leur responsabilité. »

La rentabilité de l'opération. « Le calcul a été fait par rapport à des statistiques de débit de la Desges sur quarante ans. Elles donnent un écart type. On sait qu'à minima, le revenu sera de 70.000 € par an. Cette centrale va nous permettre de couvrir notre dette sur l'auberge de Chanteuges. Cette auberge est un bienfait, il est nécessaire d'entretenir ce lieu de vie. Si la centrale nous permet de l'entretenir, de dégager des recettes à utiliser sur d'autres projets, le tout en favorisant les énergies vertes, il faut y aller. »

L'idée. Cette microcentrale tirant bénéfice du droit d'eau des moulins a été pensée pour compenser le déficit engendré par l'auberge de Chanteuges (la Comcom paye 2.000 € de remboursement de crédit par mois contre un loyer perçu de 1.000 €).
Les travaux. La turbine doit être enterrée entre les deux anciens moulins. Un réservoir dégrilleur a été construit, en amont. Il fait 11 m de long, 3,60 m de large et 4 m de haut et est équipé d'un déversoir. Il retiendra tout ce qui, drainé par l'eau, peut empêcher le fonctionnement de la turbine. De là, l'eau s'engouffrera dans une conduite enterrée dans le bief sur 650 m et ralliant la centrale. Le projet prévoit aussi de modifier la passe à poisson et le béal en amont du dégrilleur.

Pierre Hébrard

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