Un décret estival met le feu aux moulins.

Le Moniteur a oublié 450 000 ha d’étangs, dans la même galère. Nous n’avons pas le temps de développer cet article du Moniteur qui appelle 10 précisions de notre part.

1)    « La poudrière des moulins hydrauliques » ne flambe pas depuis le 30 juin 2020 mais depuis 10 ans.

2)    Le décret cité n’est pas « la pomme de discorde majeure », loin s’en faut. Les circulaires et décrets depuis 2010 sont bien plus pénalisants pour tous les ouvrages hydrauliques.

3)    Le Canard enchaîné n’a pas du tout « attisé le feu » : il a dressé un bilan très fidèle de la situation. Le feu est allumé par la DEB et les Agences de l’eau.

4)    La surprise feinte de ce décret n’est pas crédible : il a fait l’objet d’une consultation publique en mai 2019. Il apparait cocasse de crier au loup, une fois le décret signé un an après.
Qu’un recours soit exercé comme pour les précédents est la moindre des chose.

5)    Le ministère ne réglemente pas qu’en été, mais à chaque fois qu’un article de loi est promulgué pour en neutraliser l’application. Là, en effet, c’est toujours « dans le dos » des propriétaires d’ouvrages hydrauliques et un pied de nez aux parlementaires.

6)    Les agences de l’eau priorisent et subventionnent à 100 % les destructions d’ouvrages alors que la loi exige qu’ils soient « gérés, entretenus et équipés » (art L.214-17 CE), pas détruits. Au lieu de cela, l’administration suggère des équipements à des coûts exorbitants subventionnés à 40%.
C’est l’écologie sectaire et punitive.

7)    La « cohérence des renaturations » est une infox, une doctrine univoque que la science ne partage pas forcément.

8)    Effectivement, « aucun seuil ne peut être détruit sans l’accord du propriétaire ». Rien de nouveau dans ce domaine. Les propriétaires d’ouvrages (moulins et étangs) détruits connaissent les étapes qui ont permis de recueillir leur reddition :

• courriers de menaces administratives assorties de menaces de sanctions fiscales et pénales,

• désinformation sur les tenants et aboutissants en faisant dire à L’UE et à la loi ce qu’elles n’exigent pas,

• chantage à la subvention pour accepter, selon les courriers, de détruire l’ouvrage comme étant la meilleure solution pour être « en conformité ».

9)    Selon Claude MIQUEU, il y aurait « des maladresses, de la surprise et des incompréhensions ».
Que neni : le mal structurel est beaucoup plus profond.
Claude Miqueu ne peut pas éluder les sujets de cette manière infâmante : les dizaines de milliers de propriétaires d’ouvrages hydrauliques sont même capables d’analyser, de réfléchir et de comprendre.

Il prétend être fier et orgueilleux dans toutes ses interview, mais ne peut afficher aucun résultat ni aucun effet dans la résorption de l’abcès qui plombe l’application de la continuité écologique, alors qu’aucun usager ne s’oppose au code de l’environnement.
Le summum de l’échec !

10)   Cela suffit maintenant d’implorer cette coquille vide de sens de la continuité apaisée alors que le malaise s’amplifie.

Si Claude Miqueu affirme, selon son intuitu personae, « que 95% des dossiers ne posent aucun problème », nous estimons de manière toute aussi aléatoire selon les infos de terrain, que 95% des dossiers posent problème. Sa référence en Adour Garonne devra rendre compte du nombre de contentieux judiciaires.

 

S’il veut, pour lui seul, « sauver l’apaisement », nous voulons, pour nous tous, sauver les moulins et les étangs.

 

 

Nous reproduisons ci-après un article paru dans Le Moniteur ce jour.

Un décret estival met le feu aux moulins

Laurent Miguet |  le 28/08/2020  |  Patrimoine,  France ,  Droit de l'environnement

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La poudrière des moulins hydrauliques de France flambe depuis le 30 juin. L’ancien Premier ministre Edouard Philippe en a allumé la mèche juste avant de quitter Matignon, en signant un décret qui présente toutes les apparences de la réglementation estivale décidée en catimini pour tromper la vigilance des associations de défense des propriétaires de moulins.

Pomme de discorde majeure entre l’Etat et les associations de propriétaires de moulin, la continuité écologique des cours d’eau apparaît en cinquième position du décret n° 2020-828 du 30 juin 2020, consacré aux installations, ouvrages, travaux et activités (Iota).

Fin des enquêtes publiques

Conséquence du régime déclaratif qui préside désormais aux arasements de seuil de barrage après la publication de ce décret, la fin des enquêtes d’utilité publique préalables aux arasements de seuils de moulins semble s’inscrire dans la tradition des décisions qui jouent sur le relâchement estival des veilles réglementaires associatives. Sous le titre « Les agences de l’eau se battent contre les moulins », l’article publié le 19 août par le Canard enchaîné a attisé le feu.

« Rien ne laissait prévoir ce décret, lors des dernières réunions du groupe de travail mis en place par le conseil national de l’eau pour une gestion apaisée des continuités écologiques », tempête Alain Forsans, président de la fédération française des associations de sauvegarde des moulins (FFASM).

Effet boomerang

La colère s’exprime d’autant plus que l’Etat se trouve en situation de récidive : le décret du 3 août 2019, qui redéfinit la notion d’obstacle à la continuité écologique, avait déjà alerté les défenseurs des moulins sur la propension du ministère de la Transition écologique à profiter de l’été pour réglementer dans leur dos.

Le gouvernement ne va pas tarder à en subir l’effet boomerang : réputée modérée, la fédération des moulins de France (FMF), éternelle concurrente de la FFASM depuis la scission de 2002, se prépare à se joindre à un recours en Conseil d’Etat contre le décret n° 2020-828. Une troisième personne morale, l’association des riverains de France, envisage de s’associer à la procédure confiée à Jean-François Rémy, avocat au barreau de Nancy.

Choix impossibles

Selon ces associations, le décret méconnaît le principe de soumission à autorisation environnementale des opérations susceptibles de réduire la ressource en eau ou de présenter des risques pour la santé publique, surtout quand les ouvrages à détruire retiennent des sédiments pollués.

Cette nouvelle réglementation cumule ses effets avec les systèmes de subvention des agences de l’eau qui orientent les choix : des arasements entièrement pris en charge par les financements publics, ou des aménagements considérés par Alain Forsans comme hors de prix pour des propriétaires aux revenus modestes.

Le recours catalyse les forces centripètes des défenseurs des moulins : les deux associations rivales, qui ont engagé des pourparlers sur un projet de fusion, pourraient au moins aboutir à un code de bonne conduite. L’épisode en cours en a révélé le besoin : les noms d’oiseau ont amplifié le conflit sur la toile. « Sur les réseaux sociaux, certains parlent de guerre. C’est une caricature », estime Alain Eyquem, président de la FMF.

Cohérence des renaturations

En réponse aux demandes d’explication du Moniteur, les services du ministère de la Transition écologique inscrivent le texte dans une stratégie de cohérence des chantiers de renaturation : « La suppression de seuils en lit mineur de cours d’eau peut être nécessaire dans le cadre de certaines interventions comme celles visant à rétablir la course de l’eau qui permet une meilleure autoépuration, à recréer des méandres pour en allonger globalement le linéaire, à réduire les vitesses de crues et à reconnecter le cours d’eau avec les milieux humides associés ».

Loin des situations décrites dans le Canard enchaîné, les services de l’Etat sont formels : « Aucun seuil ne peut être détruit sans l’accord du propriétaire ».

De même, le régime déclaratif n’affaiblit en rien les protections patrimoniales inscrites dans les schémas de cohérence territoriale ou dans les plans locaux d’urbanisme.

Maladresse

Entre les rédacteurs du décret et la société civile, le Comité national de l’eau plaide la maladresse : président de sa commission réglementation et co-animateur du groupe de travail pour une « politique apaisée » de la continuité écologique, Claude Miqueu s’associe au constat de « surprise et incompréhension », motivé, pense-t-il, par « le manque de pédagogie et de dialogue ».

Fier du bilan d’un groupe de travail qui s’enorgueillit d’avoir associé les ministères du Sport et de la Culture à ses séances, l’élu du comité de Bassin Adour Garonne a d’autant plus mal vécu l’épisode du décret que sa publication est intervenue pendant la vacance du poste de l’autre co-animateur : Simone Saillant, directrice adjointe de l’eau et de la biodiversité, aujourd’hui remplacée par Sophie-Dorothée Duron.

L’impulsion des assises de l'eau

Le coup ainsi porté à l’idée d’une « politique apaisée » tombe d’autant plus mal que le décret découle d’une séquence de concertation conduite sans remous notables par la direction de l’eau et de la biodiversité du ministère de la Transition écologique : les assises de l’eau, et en particulier les débats consacrés au « grand cycle » qui inclut le ciel, les rivières et la mer.

« Après qu’Emmanuelle Wargon (NDLR : alors secrétaire d’Etat à la Transition écologique) nous a demandés d’assurer le suivi des assises, les élus nous ont supplié de simplifier les procédures. Un enthousiasme général avait accueilli cette idée », témoigne Claude Miqueu.

Sauver l’apaisement

Le président de la commission règlementation du CNE n’entend rien lâcher de la lettre et de l’esprit de la « politique apaisée ». Il le rappellera lors de prochaines réunions avec les secrétariats des comités de bassin, l’office français de la biodiversité, les agences de l’eau et les services déconcentrés de l’Etat.

Claude Miqueu se montre d’autant plus déterminé que selon lui, « 95 % des dossiers ne posent aucun problème ». Avant la fin de son mandat, il espère ériger le bassin Adour Garonne comme référence française en matière de continuité écologique apaisée.

 

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