Destruction d'ouvrages: le tribunal administratif de Poitiers annule un projet contesté

Le tribunal administratif de Poitiers vient d'annuler pour de multiples motifs le projet de destruction des ouvrages et de reprofilage du lit de la Boivre. Cette excellente nouvelle rappelle aux associations de propriétaires et de riverains la nécessité de porter sur le terrain judiciaire la défense des rivières et de leurs héritages quand les autres voies ont échoué. Améliorer la transparence piscicole et sédimentaire est légitime. Détruire le patrimoine hydraulique, le potentiel énergétique et le cadre de vie ne l'est pas. Aux syndicats, agences de l'eau et préfectures de proposer et financer désormais des choix constructifs, capables de concilier  tous les enjeux et de susciter l'adhésion. 

La Boivre est une rivière d'une quarantaine de kilomètres qui naît dans les Deux-Sèvres et se jette dans le Clain au niveau de Poitiers. En mars 2014, l'enquête publique sur le contrat territorial "milieux aquatiques de la Boivre et de ses affluents" avait déjà soulevé une participation sans précédent au plan local.

L'Association de protection des propriétaires riverains de la Boivre avait souligné ses motifs d'inquiétude et de colère face à une modification massive du profil de la vallée et à la lourdeur des aménagements prévus : démantèlement de nombreux ouvrages, dérivation du cours actuel, aménagement d'abreuvoirs, recharge en granulats, création de passes à poissons, etc. Le coût, estimé à plus de 1,1 M€, avait aussi soulevé la colère des citoyens et de nombreux élus, face à des bénéfices écologiques paraissant pour le moins abstraits.

Finalement, une requête en annulation du projet avait été déposée au tribunal administratif de Poitiers par l'association et par la propriétaire du moulin du Roy, à Montreuil-Bonnin. Les juges viennent de donner raison aux plaignants. Parmi les points relevés :

  • les travaux à entreprendre ne sont pas détaillés assez précisément,
  • l'intérêt général est insuffisamment caractérisé,
  • des opérations d'archéologie préventive auraient dû être prescrites sur certains sites,
  • la dérivation du moulin du Roy aurait dû faire l'objet d'une déclaration d'utilité publique,
  • les travaux dans le marais de Ragouillis sont incompatibles avec le plan local d'urbanisme,
  • plusieurs prescriptions fixées par le code de l'environnement ont été ignorées.

Comme souvent lorsqu'un dossier va en justice, on s'aperçoit que des obligations procédurales sont négligées par les syndicats et la préfecture... bien qu'ils prétendent évidement à la parfaite qualité de leur projet et au caractère rétrograde de ceux qui le contestent.

En dépit des innombrables conflits et protestations observés depuis 2009 comme de l'absence du moindre retour scientifiquement validé sur l'évolution globale de la biodiversité aquatique, un certain nombre de falsificateurs persistent à affirmer que la continuité écologique serait une franche réussite et qu'elle rencontrerait un large assentiment chez les propriétaires et riverains. Sur la Boivre, démonstration est faite qu'il n'en est rien pour ce qui est de la qualité de la gouvernance et de la rigueur du projet.

A lire : article dans la Nouvelle République

Pour vous défendre
Vade-mecum de l'association pour garantir le respect du droit lors des effacements d'ouvrages en rivière

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