Quand l’argent coule à flots dans nos cours d’eau.

La continuité écologique reprend un dogme de la Rome antique : « Carthago delenda est » (il faut détruire Carthage). Ce précepte a effectivement été mis en œuvre par les Romains.

Malgré les fonds publics disponibles, pas sûr que l’autorité en charge de l’eau Française n’arrive au même résultat peu glorieux, en raison de fortes oppositions et défaut de co-construction.
Nous reproduisons ci-dessous la contribution pertinente d’un lecteur.

 

 

 

Une histoire d’aujourd’hui en Avant-Pays Savoyard

La Leysse de Novalaise – (2012-2020)

 

La truite Fario

Dans l’avant-pays savoyard, il semble que l’on pourrait dater l’arrivée de la truite fario à -15 000 ans, ce qui est assez récent et qui correspond approximativement au recul des glaciers qui couvraient l’ensemble du territoire (Chez nous : Truite méditerranéenne Salmo Rhodanensis) 

« Les différences de robes que nous, pêcheurs, découvrons à chaque prise ne sont pas à même de déterminer des souches différentes selon les rivières. Dans un même ruisseau on pourra trouver des truites sombres, claires, à gros points ou à petits…

La truite de mer et la truite lacustre ne sont pas des espèces en soi mais de simples truites normales ayant choisi de vivre ailleurs et arborant alors une livrée différente.

On peut se plaindre de la baisse du nombre de truites dans nos rivières, « il y en avait plus avant », entends-je régulièrement. Mais avant il y avait bien moins de journées où l’eau dépassait le seuil fatidique des 19 °, les techniques étaient moins pointues et les pêcheurs peut être moins bons. Les anciens, habitant près des sources de l’Yonne, en plein cœur du Morvan, mangeaient régulièrement des fritures de truitelles comme c’était l’usage. Désormais ce comportement est terminé mais il n’y a pas plus de truites dans la rivière. Je la pêche depuis presque 30 ans et dans ce secteur où aucune pollution n’existe, où très peu de pêcheurs officient, le nombre de truites et surtout leurs tailles que je pique ne cesse de se réduire. » (Gaël DENYS, Muséum National d’Histoire Naturelle / Paris / Les poissons d’eau douce de France, éditions Biotopes 2011)

Ce témoignage relève ainsi que la hausse des températures constitue un motif, en absence de pollutions caractérisées, de la réduction du nombre de truites fario dans le cours d’eau de l’Yonne. Il semble indiquer que la pression du loisir-pêche ne semble pas constituer un autre facteur.

A la lecture de nombre de témoignages, ce constat semble assez général en France et pourrait s’appliquer au ruisseau de la Leysse qui serpente dans le secteur de Novalaise, en Avant Pays Savoyard. C’est du moins ce que des études auraient déterminé avant les années 2000, si l’on en croit les services de l’A.F.B., aujourd’hui O.F.B. (Office Français de la Biodiversité).

 

Histoire d’eau sur la Leysse de Novalaise

 

• 13 septembre 2012

Procès-verbal est dressé à l’encontre du propriétaire d’un moulin actionnant une scie battante datant (preuve à l’appui) d’avant l’an 1700. Ce moulin alimente une turbine hydraulique pour la petite scierie grâce à un bief (barrage, canal, petite réserve d’eau, turbine, canal de fuite pour le retour de l’eau vers le cours d’eau) prenant son eau à près de 800 mètres en amont dans la « Leysse de Novalaise » qui se jette dans le lac d’Aiguebellette.
L’ensemble, dernier vestige de la grande époque des moulins établis le long de nos rivières, possède une valeur patrimoniale incontestable.

Le fondement de ce procès-verbal est lié à l’inobservation du « débit réservé » (art L.214-18 du Code de l’environnement).

• 22 octobre 2015

Après réalisation des travaux nécessaires, l’Administration (service environnement, eaux, forêts) reconnaît que le propriétaire a effectué les travaux exigés en même temps qu’elle constate que « la richesse du milieu s’est développé dans le canal et l’étang en extrémité aval : présence de carpes, truites, écrevisses et salamandres dans les zones humides alentour » (résultats particulièrement favorables à la biodiversité).

 • 17 octobre 2016

En vertu de l’article L211-1 du Code de l’Environnement, un arrêté du Préfet de la Savoie n°2016-1598 vient valider l’installation de la scierie et autorise la poursuite de l’exploitation sous toutes les contraintes habituelles.

• 19 avril 2017

Sous l’intitulé « continuité écologique », la même administration préfectorale indique au propriétaire que le cours d’eau « Leysse de Novalaise » a été classé en liste 2 au titre de l’article L.214-17 du Code de l’environnement en précisant que ce classement impose le maintien ou la restauration de la continuité écologique, « en particulier pour ce qui concerne la franchissabilité piscicole ». Le propriétaire sera donc tenu de construire une passe à poissons et le courrier indique que des financements partiels peuvent être accordés par l’Agence de l’Eau Rhône-Alpes- Méditerranée mais sous condition de rapidité dans l’exécution des travaux.

Quelques précisions s’imposent :

· en l’an 2000, une Directive-Cadre sur l’Eau (européenne) sur l’eau impose une réglementation sur la gestion de l’eau, « bien commun de l’humanité », que chaque Etat de l’Union Européenne est tenue de mettre en œuvre.

· En 2006, l’Etat français transpose cette Directive dans une Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques dite  LEMA2006. 

· Ces deux textes s’attachent essentiellement à des  objectifs d’amélioration de la qualité de l’eau, la maîtrise de cette ressource et, secondairement, la « continuité écologique ». Ces deux textes de référence insistent surtout sur une méthode nouvelle de mise en œuvre de la réglementation : « la gestion participative », c'est-à-dire la mise en place d’espaces et de méthodes de concertation avec toute la population. Cela concerne donc autant les propriétaires d’ouvrages hydrauliques que les riverains, les associations de pêcheurs, celles qui défendent le patrimoine mais aussi tous les citoyens intéressés.

· En France, la continuité écologique sera traduite prioritairement, au sein de l’Administration, par la volonté de redonner à tous les cours d’eau, du plus petit ruisseau au plus grand fleuve,  le retour à un « état naturel » modifié par la main de l’homme. Ceci se traduit aujourd’hui dans une volonté farouche de destruction ou d’évitement de tous les équipements construits par l’homme et susceptibles de gêner le bon écoulement des eaux, le transport des sédiments ou la circulation des espèces aquatiques.

• 4 juillet 2017

Réunion sur le site entre le propriétaire, l’Administration, l’Agence Française de la Biodiversité (A.F.B.), un hydraulicien et l’adjoint au maire de Nances. Dans son compte-rendu de cette réunion (daté du 7 juillet) l’Administration précise les impératifs de création d’une passe à poissons sur le seuil des moulins.

Il est nécessaire « de rétablir la circulation piscicole dans les deux sens, avec pour espèce cible la truite fario. La mairie de Nances fait état des différents échanges et études relatifs à la continuité écologique ayant eu lieu entre 2000 et 2004, parmi lesquels une conclusion de l’époque est la non-priorité de mener une action sur le seuil des Moulins tant que l’attractivité de la confluence avec le lac n’est pas améliorée ». L’Administration, quant à elle, considère que « la faiblesse des populations présentes n’est pas un argument pour ne rien faire: au contraire, l’état actuel peut être la cause de cette faiblesse, et un statu quo pourrait, à terme, mener à la disparition de la truite fario sur le cours d’eau ».

Elle indique également qu’il faut permettre aux truites de remonter le cours d’eau en amont du seuil lors des périodes de frai et lorsque les eaux sont trop chaudes en aval.  Il convient également que le propriétaire se dépêche s’il veut éviter de perdre le bénéfice des subventions de l’Agence de l’eau.

L’Administration préconise ainsi la construction de 5 bassins en enrochements bétonnés accolés au seuil sans indiquer le coût estimé de cet ouvrage (des chiffres importants mais très variés ont été avancés selon la nature des matériaux).

• 22 août 2017

Répondant à l’Administration, le propriétaire

     - indique que sa situation, tant familiale que financière, ne lui permet pas de financer un investissement sans rapport avec ses moyens (celui-ci perçoit le revenu minimum).

     - demande que lui soit communiqué l’ensemble des documents du dossier qui justifie le classement de la Leysse en liste 2 (classé dans la même catégorie que l’Ainan ou le Guiers voisin)

     - note que l’infranchissabilité de son seuil n’est prouvé par aucune étude mais ne constitue qu’une estimation alors qu’il constate de visu son franchissement en période de frai.

     - s’étonne surtout que le caractère de seuil naturel n’ait pas été noté par les experts alors même qu’au moins l’un d’entre eux a constaté et photographié le banc de mollasse dure qui caractérise le passage de la Leysse au niveau du seuil.

     - questionne l’Administration sur les causes de la baisse de peuplements de truite fario, entre autres la prolifération des prédateurs (hérons, harles ou pêcheurs) ainsi que les niveaux de pollutions agricoles, domestiques ou autoroutières, bien relevées, celles-ci, par les experts.

     Le propriétaire indique alors clairement à l’Administration « qu’il ne peut s’engager ni sur le principe de construction d’une passe à poissons inadéquate, ni sur un financement qu’il ne peut assumer au vu de ses ressources ».

 

• 8 janvier 2018

En réponse à ce courrier, la DDT organise une réunion sur place regroupant 11 personnes (le propriétaire - la DDT (2) - l’Agence Française de la Biodiversité - la Mairie de Nances - la Communauté de Communes du Lac d’Aiguebelette (2) - le Conseiller départemental - 3 citoyens soutenant le propriétaire.

Suite à cette réunion, le 12 janvier 2018, la DDT établit un compte-rendu de réunion ne reprenant aucune des questions et contestations présentées lors de cette réunion et « confirme la nécessité d’aménager cet ouvrage ».

• 16 janvier 2018

Le propriétaire répond à la DDT en rappelant que les lois, tant européenne que française, imposent une « gestion participative de l’eau » et que ce dossier n’est pas un modèle de respect de cette méthode.

De plus, quatre études différentes semblent avoir été menées : seules deux d’entre elles ont été portées à la connaissance du propriétaire. Détail étonnant, la première situe la hauteur du seuil à 1,25 mètres, la seconde à 1,50 mètres. En mesurant au niveau laser, la différence de niveau de l’eau entre l’aval et l’amont se révèle située aux environs de 1 mètre. Comment les experts sont-ils arrivés à des mesures si différentes et ne correspondant pas à la réalité d’une mesure de hauteur de chute correspondant à la différence entre la cote NGF de la crête et le cote NGF de la restitution.

De plus, des pièces obligatoires manquent au dossier telles que le « l’analyse coût/bénéfices » ou « la grille d’analyse et de qualification du patrimoine lié à l’eau ».

Enfin, et surtout, l’obligation d’assurer la continuité écologique prévue par l’article L214-17 du Code de l’Environnement fait l’objet d’une exception créée, postérieurement, par l’article L.214-18-1 du même Code qui dispense les moulins de l’art L.214-14 CE.

• 26 mars 2018

L’Administration répond en précisant que, pour bénéficier de la « dérogation moulins » (article L214-18-1), les installations doivent répondre à quatre exigences, sans fournir aucune indication sur l’origine réglementaire des dites exigences. Si elle reconnaît que les trois premières conditions sont satisfaites, la quatrième ne l’est pas. « L’installation doit être régulière au regard de la police de l’eau.  A ce jour, vous n’avez pas démontré que vous répondiez à ces quatre critères cumulatifs, notamment concernant la régularité de l’ouvrage ».

Pour justifier également sa position, l’Administration indique que : « Ce cours d’eau étant classé au titre de l’article L432-6 en 1990, ce seuil aurait déjà dû être aménagé pour permettre la libre circulation de la truite fario ».

Enfin, se rappelant sans doute d’un précédent courrier qui signalait l’absence de la fameuse « grille d’analyse patrimoniale », elle rappelle au propriétaire qu’il peut librement contacter un bureau d’études pour réaliser celle-ci.! (à ses frais bien évidemment).

• 16 avril 2018

Le propriétaire rappelle à l’Administration que, d’une part l’arrêté préfectoral  de 2016 a déclaré régulière son installation et que, d’autre part,: « l’article L432-6 du Code de l’Environnement  qu’elle invoque  est abrogé depuis le 31 décembre 2006, remplacé par l’article  L.214-17 CE ».

 • 29 octobre 2018 (courrier reçu le 12 novembre 2018)

Manifestement, ce dernier courrier aura posé de gros problèmes aux services préfectoraux de la DDT car la réponse arrive au bout de 7 mois et 16 jours. En réalité, les fonctionnaires qui s’acharnent sur ce dossier n’ont plus d’arguments à opposer au propriétaire ?

 • 16 novembre 2018

Le propriétaire répond alors laconiquement : « avant de me soumettre aux idées de quiconque, je me dois de respecter les décisions de la représentation nationale prises le 24 février 2017 et portant dérogation de continuité écologique pour mon moulin. Je suis donc au regret de ne pouvoir donner suite à ce dossier ».

Note OCE : il ne s’agit pas du tout d’une dérogation mais tout simplement de se prévaloir de l’art L.214-18-1 CE

• 19 décembre 2018

L’Administration, dans des termes beaucoup moins abrupts et sans nouvel argument maintient sa conclusion inébranlable :« J’ai donc le regret de vous informer que je maintiens ma position et vous demande de bien vouloir transmettre un avant-projet des travaux, pour le 1er mars 2019, afin d’éviter l’engagement d’une procédure contentieuse ».

Le propriétaire décide simplement d’attendre la suite des évènements.

De son côté, l’Administration rumine… une année entière !

Ce n’est qu’un jour de décembre 2019 que le propriétaire est contacté téléphoniquement par le Défenseur des Droits de Savoie (DDS). Celui-ci intervient pour défendre les droits de l’Administration et accepte une réunion sur le site avec le propriétaire pour discuter du dossier.

Le DDS intervient donc sur la demande de l’Administration ?   Le DDS n’est-il pas plutôt réservé à la population soumise au harcèlement de l’Administration ? Peu importe ! Il est clair que l’intervention DDS ne constitue qu’une porte de sortie honorable aux fonctionnaires pour tenter de sauver la face.

En fin de journée de la visite du DDS, celui-ci rappelle le propriétaire: « rassurez-vous, le moulin entre bien dans le cadre de la dérogation-moulin et se trouvera donc affranchi de l’obligation de continuité écologique ». Aucun écrit ne sera jamais transmis au propriétaire par le DDS. Le propriétaire obtient donc satisfaction.

• 22 janvier 2020

L’Administration clôt le dossier par un courrier : « je vous confirme que vous pouvez bénéficier de la dérogation ». Mais pour en ouvrir immédiatement un nouveau : « il est regrettable de ne pouvoir aménager cet ouvrage qui reste bloquant pour la population piscicole ». L’Administration a sollicité une association de pêcheurs pour se substituer au propriétaire dans la réalisation de la fameuse passe à poissons et « invite (le propriétaire) à contacter le directeur de la Fédération de Savoie pour la Pêche et les Milieux Aquatiques (nom et n° de téléphone)  pour plus de précisions ».

      Affaire à suivre ….

 

 

Un argument original et contradictoire

(Propos d’un acharné de la construction des passes à poissons)

 Lors de la discussion sur le terrain avec un représentant de l’AFB, le 8 janvier 2018, nous avons pu noter un échange particulièrement étonnant.

 

L’AFB ; « les truites ne peuvent pas remonter le seuil des moulins pour frayer »

Un témoin : « pourtant, il y a encore beaucoup de truites en amont du seuil »

L’AFB : « oui, mais parce qu’elles sont là depuis le retrait des glaciers »

Il s’en suit un mouvement d’amusement et d’étonnement au sein du groupe.

 

Cet argument du fonctionnaire ouvre la voie à l’idée que deux peuplements de truites différentes occupent la Leysse :

 

- d’une part celles qui remontent du lac en s’arrêtant au seuil, puisqu’elles sont censées ne pas pouvoir franchir l’obstacle ; seraient-ce les fameuses « truites lacustres » présentes dans les rapports d’études ?

- d’autre part les truites originelles dites « fario », présentes depuis des millénaires, qui vivent en amont du seuil.

 

Ce fonctionnaire spécialiste statutairement de la biodiversité et militant pour la défense de la truite fario, ne devrait-il pas conclure qu’il convient d’empêcher le franchissement du seuil des moulins par la truite lacustre afin de préserver la pureté de l’espèce fario survivant en amont ?

 

Les grands mythes

 

En réalité, l’ensemble de ce dossier est construit sur deux mythes :

 

 - celui de la pureté de la truite fario dans le ruisseau de la Leysse. Le simple bon sens permet à chacun de convenir qu’alevinages et empoissonnements ont largement mélangé les espèces.

 

· celui de la responsabilité du seuil des Moulins dans la disparition progressive de la truite fario. Pêcheurs et connaisseurs de toutes nos rivières ont constaté la disparition progressive de la truite au cours de ces dernières décennies alors que les seuils et barrages sont présents depuis des siècles. Ces derniers ne peuvent donc, en aucun cas, être tenus pour responsables de ce problème.

 

Constats et réflexions

 

Les dossiers d’études ne démontrent à aucun moment la responsabilité du seuil des Moulins dans la raréfaction de la truite fario et n’exposent pas davantage les actions menées ou à mener contre les autres causes du problème. Aucun taux d’infranchissabilité du seuil par la truite ne figure dans les dossiers ni lors des discussions, l’argumentaire partant du principe que « le seuil est infranchissable ».

Pourtant un calcul simple, présenté dans le tableau ci-après, indique le nombre d’années nécessaires à la disparition d’une population de 1.000 truites en fonction d’un taux de perte de l’effectif (ici, le taux d’infranchissabilité du seuil).

 

 

Taux d'infranchissabilité

-10%

-20%

-30%

-40%

-50%

-2,1%

Nombre d'années nécessaires pour aboutir à un effectif inférieur à 2

60

28

18

13

9

320

 

 

Dans l’hypothèse où la disparition de la fario est directement proportionnelle à l’infranchissabilité du seuil, on s’aperçoit ainsi, par exemple, que si celui-ci empêche 50% des géniteurs(trices) de remonter aux frayères d’amont, il suffit de neuf années pour éliminer la population de truites de la rivière. En réalité, et en conformité avec toutes les observations, la disparition rapide de cette espèce n’est constatée que depuis ces dernières décennies. Ce seuil, comme tous les seuils anciens, ne peut, en aucune façon, être tenu pour responsable du problème.

 

Demeure l’argument des pêcheurs de truite qui regrettent que le seuil interdise la montaison en période de canicule pour permettre à ces truites de se tenir au frais en amont, au plus près de la source alors qu’ils procèdent à des empoissonnements (dits alevinages). Peut-on imposer aux propriétaires de financer des passes à poissons pour motif de réchauffement climatique ? L’argent public va-t-il financer ce genre de travaux dans un cours d’eau qui, en période estivale est en assec ?

 

Toutes les péripéties de cette histoire auront mis en lumière l’incroyable mécanique intellectuelle d’une approche dogmatique de la réalité par des services administratifs qui n’ont manifestement ni intégré les obligations liées à la gestion « participative » imposée par la Loi sur l’eau, ni accepté les articles de loi qui contrarient leurs a priori. Aucun des arguments contraires présentés à l’Administration par le propriétaire n’a obtenu la moindre prise en compte ni discussion. On se demande où est la co-construction ?

 

Comme CATON, le sénateur romain qui terminait chacun de ses discours par la formule «Carthago delenda est » (Carthage doit être détruite) les fonctionnaires des D.D.T. et O.F.B. ont le même discours, celui de la destruction des ouvrages. Nous veillerons à ce que cette prescription ne se concrétise pas en France.

 

A l’heure où il conviendrait de constituer des réserves d’eau, la politique menée par l’Administration consiste à supprimer seuils, barrages, étangs, biefs et autres plans d’eau, ceci dans l’indifférence quasi générale. Alors que ce genre de situation se rencontre partout en France, pourquoi cette indifférence des médias tant nationaux que locaux ?

 

Quant aux élus locaux responsables (communes ou établissements publics locaux), possédant la responsabilité juridique et donc concernés au premier chef par la gestion de l’eau, faut-il plus les plaindre que les blâmer ? Sans les connaissances techniques ni la possession du langage ésotérique qu’ont développé les « spécialistes », peuvent-ils prétendre s’opposer aux oukases de l’agence de l’eau, l’OFB et la DDT (M) réunis ? Pourtant, l’apparente technicité du sujet se situe à cent lieues de l’observation, la réflexion, le simple bon sens et surtout le respect de la loi. On peut ajouter que les élus doivent se sentir bien fragiles face à la puissance financière de l’agence de l’eau, grande ravageuse des factures d’eau sur la ligne des redevances.

 

L’association de pêcheurs chambériens, soi-disant concernée par la Leysse de Novalaise (aucun droit de pêche ne semble avoir jamais été octroyé sur ce ruisseau), est restée d’une discrétion totale et ne semble pas vouloir réaliser cette passe à poissons.  Une association locale s’engagera-t-elle dans ce projet ? L’agence de l’eau financera-t-elle cette passe à poissons qui dénaturera le site ?  Quel en serait le résultat coût-bénéfice ?

 

Jusqu’à quand l’argent public coulera-t-il à flots dans nos cours d’eau ?  Dans ce dossier, l’argent public a déjà largement financé études, temps perdu sur le terrain et dans les bureaux. L’exemple tout proche des travaux d’évitement du seuil de la Corderie à Les Echelles, réalisés en 2004, suivis de nouveaux travaux de rectifications en 2014, puis en 2015 est un magnifique exemple de cette gabegie (coût de plus de 500.000 euros pour les deniers publics).

« Le rapport 2015 de la Cour des Comptes s’attaque dans son rapport annuel à la gestion des six Agences de l’eau qui collectent nos chères redevances, financées pour une très large part par les particuliers. Subventions généreuses, contrôles inexistants, mansuétudes envers les pollueurs, mélange des genres, conflits d’intérêt y sont abondamment dénoncés et semblent monnaie courante dans ces agences chargées localement de la politique de l’eau.

Je cite : « Les redevances perçues par les agences se sont éloignées du principe pollueur-payeur depuis 2007. Si les particuliers ont vu leur facture d’eau augmenter de 25 %, acquittant au passage en moyenne 87 % du montant total des redevances en 2013, la part de l’industrie ne représente plus, toujours en moyenne, qu’environ 7 %, celle des agriculteurs 6 %.

La Cour des Comptes met clairement en cause la composition des Conseils d’Administration des Agences. L’Etat y est minoritaire, les usagers professionnels surreprésentés (55 % à 73 %), au détriment des particuliers (9 % à 17 %), car industriels et agriculteurs se sont, en fonction des agences, emparés d’un maximum de sièges dévolus à ces usagers. Cette organisation entraîne de nombreux « conflits d’intérêt ». (C.L.C.V., Le Monde) »

 

 Si les recours judiciaires s’accumulent désormais, un peu partout en France, contre cette frénésie destructrice des ouvrages anciens sur les cours d’eau il nous semble y avoir des raisons légitimes

 

Bernard LANFREY, citoyen français, retraité des Finances Publiques et soutien du propriétaire.

 

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