Une fonctionnalité pernicieuse du cours d’eau ; quels remèdes ?

C’est précisément son état qui lui confère cette fonctionnalité de transport. A Madère les canaux se nomment "lévada" du portugais levar qui signifie "porter". De fait, nos cours d’eau transportent inexorablement tous nos déchets et notamment le plastique vers l’océan. Il n’existe aucune étude sur la quantité de plastique dans les fonds marins. Quels impacts sur la biodiversité, la dispersion des espèces et le transfert des pathogènes ? Nous jetons nos plastiques, ils sont présents dans la chaîne alimentaire et nous les retrouvons déjà dans notre corps. 

A titre de précaution élémentaire, il serait intéressant d’interdire l’usage du plastique à une certaine distance des cours d’eau au lieu de recourir à l’usage de bâches et autres produits qui, une fois déchirés, se retrouvent dans les rivières.

Les travaux de restauration dite écologique des cours d'eau mettent très souvent en oeuvre des pratiques et des matériaux éloignés de l'écologie.

les manchons de protection des plants se retrouveront bientôt dans le ruisseau

Nous reproduisons cet article d’Aqueduc info

Les fleuves déversent chaque année dans les océans de 1,1 à 2,4 millions de tonnes de plastiques

En 2050, il y aura dans les océans davantage de plastiques que de poissons, si  rien n’est fait entre temps pour contrecarrer ce type de pollution. Cet avertissement avait été émis en janvier 2016 par le Forum économique de Davos [1]. Le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, l’a repris à son compte lors de la Conférence sur les océans qui s’est tenue à New York du 5 au 9 juin 2017. Le message est certes d’abord politique et doit être sans aucun doute pris au sérieux. Mais sur quelles bases scientifiques repose-t-il ?

En 2015, une équipe de chercheurs conduite par Jenna R. Jambeck, professeur à l’Université américaine de Géorgie [2], avait déjà tenté d’évaluer la masse de déchets plastiques déversés dans les océans en se basant sur des données mondiales de déchets solides, et en tenant compte des densités de population et de leur statut économique. Elle avait alors conclu qu’en 2010 pas moins de 275 millions de tonnes de déchets plastiques avaient été générées dans 192 pays côtiers, et que 4,8 à 12,7 millions de tonnes de ces déchets s’étaient finalement retrouvées dans les océans.

La fondation néerlandaise The Ocean Cleanup, qui développe des technologies de pointe pour débarrasser les océans de leurs "soupes" de plastiques, a à son tour cherché à savoir quelle quantité de ces déchets était plus particulièrement drainée vers les mers par les rivières côtières et les fleuves. Pour ce faire, une équipe dirigée par un chercheur français, Laurent Lebreton, a créé un modèle à partir de données mondiales combinant la densité de population, la gestion des déchets, la topographie, l’hydrographie et l’emplacement des barrages.

Il apparaît, au terme des recherches menées sur plus de 40’000 cours d’eau et dont les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique "Nature" [3], que chaque année entre 1,15 et 2,41 millions de tonnes de plastique sont charriées par les fleuves vers les océans, dont les deux tiers par une vingtaine de fleuves majoritairement situés en Asie. Le Yangtsé, avec ses quelque 330’000 tonnes de plastique déversées dans la mer de Chine orientale, figure en tête de liste des bassins hydrographiques qui contribuent le plus à la pollution océanique mondiale.

 

Le modèle mis au point par The Ocean Cleanup montre également que les dépôts de plastique par les rivières sont étroitement liés au drainage des débris des rives et des ruisseaux qui débouchent sur les voies d’eau principales, et que ces apports varient selon les saisons. Au niveau mondial, c’est principalement entre mai et octobre que les cours d’eau apportent le plus de déchets plastiques dans les mers. Commentaire de Boyan Slat, jeune fondateur et patron de The Ocean Cleanup : "Nous sommes ravis de voir que de nombreuses initiatives ont été prises au cours des dernières années pour sensibiliser [les opinions publiques] au problème de la pollution des océans. Mais si nous voulons que notre travail soit à long terme couronné de succès, il est crucial que les gouvernements et d’autres organisations accélèrent leurs efforts pour atténuer les sources du problème que nous cherchons à résoudre. Les résultats de cette dernière étude peuvent fournir une aide à ces efforts."

Sa Fondation a pour ambition de lutter contre ce type de pollution grâce à de longues barrières filtrantes munies de filets capables de piéger les débris de plastiques. Un premier prototype est en cours d’expérimentation depuis l’été 2016 dans la mer du Nord, à la suite de quoi un vaste projet comprenant plusieurs petits systèmes libres devrait être lancé dès 2018 dans le Pacifique. (Source : The Ocean Cleanup)

 

 

Notes

[1] World Economic Forum, Ellen MacArthur Foundation and McKinsey Center for Business and Environment : The New Plastics Economy : Rethinking the Future of Plastics, 2016.

[2] Jenna R. Jambeck et al., Plastic waste inputs from land into the ocean,
Science, 13 Feb 2015.

[3] Laurent Lebreton et al., River plastic emissions to the world’s oceans,
Nature Communications 8, 07 June 2017.

 

Voir le film du 24/06/2017 sur Arté ; .documentaire intitulé « Océans, le mystère plastique » de Vincent Perazio

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