Classement des cours d'eau: les autorités en charge de l’eau vont-elles tenir compte des observations ?

La consultation pour le classement des cours d’eau du bassin Rhône-Méditerranée s’est achevée le 14 janvier 2013. L’administration a reçu 185 observations critiques sur le projet de classement. Nous en publions une d’excellente qualité, reçue à l’Observatoire.

Contribution de l’APIRM : téléchargement   Avis_APIRM_Classements_L1L2_janv2013_Vdef

L’Association pour la prévention des pollutions industrielles et la protection de l’environnement Rhône Moyen (APIRM) a publié une critique remarquablement informée du classement (dossier ci-dessus). Voici la synthèse des problèmes observés :

1- Une concertation départementale non approfondie (acteurs peu associés, réunions superficielles et quasiment pas de prise en compte des remarques transmises par courriers en particulier en Rhône-Alpes),

2- Des insuffisances dans la définition exacte des projets de classements et des renseignements fondamentaux associés (identification précise des très petits cours d’eaux, ouvrages concernés et nature de l’objectif recherché en liste 2 : montaison, dévalaison, transfert sédiments, espèces associées) non précisés,

3-   Des justifications très insuffisantes des propositions de listes 1 et 2 avec en particulier un manque fondamental de lien avec l’objectif de bon état. Sur un plan juridique, il convient de relever également sur certaines propositions le non-respect de textes de référence comme la DCE, la loi ou les circulaires encadrant la démarche,

4-  Au final des propositions en listes 1 et 2 exagérées : En liste 1, la quasi-totalité des réservoirs biologiques et des masses d’eaux en TBE non définies explicitement dans SDAGE ainsi que la totalité des zones d’action long terme du plan anguille ont été retenus ce qui conduit à des densités de cours d’eau en liste 1 extraordinaires dans certaines zones ; En liste 2, plus de 2000 ouvrages concernés avec une probabilité forte d’atteinte de seulement un tiers de l’objectif,

5-  Des propositions non équilibrées en termes de cohérence avec les autres enjeux Le développement de l’hydroélectricité est bloqué par la liste 1 et la liste 2 intéressant plus de 2000 ouvrages présente une impossibilité factuelle et financière de réalisation.

Signalons qu’outre un examen attentif de certains cours d’eau L1 / L2 démontrant le caractère infondé du classement, l’ARPIM a produit en annexe de son évaluation un très intéressant texte de recherche :

Branco P et al (2012),  Ecohydraulic Approaches for Restoring Habitat Connectivity and Suitability Ecological Engineering, 48, 70–78

Ces chercheurs portugais ayant examiné 196 sites dans trois bassins, ne trouvent pas de lien significatif entre la continuité et la distribution des espèces. Un travail à la lire à la lumière de celui de Chaplais 2010, dont l’OCE a montré que le principale conclusion (70 à 80% de la variance de qualité piscicole non associée à l’étagement par les seuils) ne plaide pas vraiment pour les mesures extrêmes souhaitées par l’autorité en charge de l’eau. (Outre que cette conclusion paraît encore peu robuste statistiquement et demande d’attendre le travail de plus grande ampleur de D. Salgues à partir du croisement Syrah-IPR-ROE).

 Autre annexe de cette contribution : une analyse d’un chantier fort coûteux sur la Boucle du Guiers. Boucle du Guiers 4 .              Cette opération, dont l’intérêt environnemental n’a jamais été réellement évalué ni le suivi détaillé réellement effectué, fut un véritable désastre patrimonial et culturel.

L’Observatoire suivra avec intérêt la manière dont les autorités en charge de l’eau prendront en compte les observations qui leur sont faites en Rhône-Méditerranée Si l’on en croit les précédents en Seine-Normandie, Loire-Bretagne et Artois-Picardie, cette « consultation règlementaire » ressemble à une simple formalité n’affectant guère les choix de la puissance publique. Et poussant en conséquence les parties prenantes aux contentieux, afin de requérir la nullité des classements ainsi décidés au mépris de l’avis des usagers, riverains et citoyens.

Il serait d’autant dommageable que les autorités en charge de l’eau persistent dans cet autisme que leur tutelle (le Ministère de l’Ecologie) et la Cour des Comptes ont acté des dysfonctionnement graves de l’Onema et de la faillite du Système d’information sur l’eau, dont les données vont recevoir un audit. (Voir les documents sur cette page)

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